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Libération
Reportage

A Lyon, visite dans le squat très sélectif du GUD

Le groupuscule d'extrême droite occupe un local du centre-ville qu'il assume de réserver aux «Français de souche». Une procédure d'expulsion est envisagée.
Le chef du GUD à Lyon, en mai. (Photo Daphné Gastaldi)
publié le 30 mai 2017 à 7h02

Jalousement gardée, la porte du squat s'entrouvre pour laisser passer une jeune femme aux cheveux peroxydés et mini-short. Depuis samedi, quelques militants du Groupe Union Défense (GUD), tatouages et croix celtiques gravés sur les bras, occupent un vieux bâtiment municipal vacant situé dans un quartier huppé du centre-ville de Lyon. Du fond du couloir parvient le bruit d'une disqueuse. «On a l'eau et l'électricité depuis ce matin», se satisfait Steven Bissuel, 23 ans, les ongles noircis par les travaux.

A la tête de ce groupuscule d'extrême droite radicale recréé à Lyon en 2011, filiale du mouvement étudiant parisien d'Assas, l'entrepreneur lyonnais explique vouloir rénover le lieu inoccupé et «redonner ce local au peuple». En faisant le tri pour ne garder que des «Français de souche». «Des Français ou des Européens de culture et de langue française, avec de la famille issue de notre pays par exemple», précise-t-il sans complexe. Pour payer les travaux, cette poignée d'ultras, surnommés les «rats noirs», ont organisé une cagnotte en ligne, au nom de leur nouveau mouvement «Bastion social».

Chiffon rouge

Leur but serait d'aider des «compatriotes» vivant sous le seuil de pauvreté, qu'ils estiment défavorisés par rapport au traitement des «clandestins extra-européens». Un argument de propagande utilisé par le Front national également. Pour rétablir les faits, rappelons que les migrants en situation irrégulière ou en cours de régularisation n'ont pas accès aux logements sociaux en France. Cette «préférence nationale» agitée comme un chiffon rouge est un pilier de leur idéologie. Sur les réseaux sociaux, des groupuscules tendance nationaliste comme Autour du Lac (Annecy) ou Edelweiss Pays de Savoie ont répondu à l'appel pour cette occupation.

Adeptes d'actions «percutantes», les Gudards lyonnais n'en sont pas à leur premier coup de communication. «Il faut que les Français sortent de la dormition, cet état léthargique, pour reprendre les mots de Dominique Venner», lance mécaniquement Steven Bissuel, en citant l'essayiste controversé d'extrême droite qui s'est suicidé dans la cathédrale Notre-Dame de Paris en mai 2013. Le numéro 1 des «rats noirs» à Lyon dit s'être inspiré, pour son opération, d'actions similaires menées par les néofascistes de Casa Pound en Italie ou Hogar social en Espagne.

Action française, Front national et villiéristes

Une procédure d'expulsion est envisagée  dans le IIarrondissement de Lyon. Les gudards promettent de ne pas plier face à la «police politique» et d'ouvrir un nouveau squat s'ils sont expulsés. «S'ils viennent, on résistera », conclut Steven Bissuel, avant de retourner au chantier.

Dernièrement, ces militants se sont illustrés en menant une action violente devant un local d’En marche, avec des fumigènes. Pendant l’entre-deux-tours, une trentaine de jeunes gudards ont joué les agents de sécurité lors d’un rassemblement anti-Macron à Lyon, auquel se sont conviés pêle-mêle des membres de l’Action française, du Front national ou des villiéristes.

Sans parler des intimidations à l’encontre d’un journaliste de Rue89Lyon, spécialiste de ces mouvements identitaires régionaux. Depuis plusieurs années, l’extrême droite radicale est bien ancrée dans le Vieux Lyon, avec de nombreux points de chute du GUD (salon de tatouage, local à Saint-Just, boutique de vêtements), de Rebeyne!-Génération identitaire (local et salle de boxe La Traboule) ou encore de l’Œuvre française. Une zone touristique, symbole des traditions lyonnaises, qui n’a pas été choisie au hasard par les extrémistes.