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Libération
Compte rendu

Le Pen veut faire des européennes une revanche contre Macron

Invitée de «l'Emission politique», la patronne du Rassemblement national, qui mène la campagne de sa formation pour les élections sans en être la tête de liste, s'est montrée en opposante naturelle à Macron peu au fait des dossiers politiques mais particulièrement agressive.
Marine Le Pen sur le plateau de «l'Emission politique», jeudi soir. (Photo Martin Bureau. AFP)
publié le 15 mars 2019 à 9h47

Deux ans après son débat catastrophique dans l'entre-deux-tours de la présidentielle, Marine Le Pen s'est montrée jeudi en cheffe d'une opposition systématique à la politique d'Emmanuel Macron, tout en assumant son attachement à l'extrême droite identitaire et son rejet total des institutions européennes. Invitée sur France 2 de l'Emission politique, la députée du Pas-de-Calais, mise en examen dans l'affaire des assistants présumés fictifs au Parlement européen, a même justifié l'utilisation par son parti d'attachés «de députés du Rassemblement national, élus sur une liste du Rassemblement national par des électeurs du Rassemblement national», pour «faire de la politique avec leur député» sans «faire de travail pour l'Union européenne», mais tout en étant payés par elle. «Les députés qui luttent contre l'UE ne pourraient pas avoir des assistants payés par leurs propres électeurs ?» a fait mine de s'interroger la présidente du RN (ex-Front national), alors que son parti est accusé d'avoir mis en place, sur deux mandatures, un système généralisé pour rémunérer avec des fonds de l'Union européenne des personnes qui travaillaient en réalité pour lui.

Marine Le Pen achevait là une séquence de questions-réponses avec deux journalistes de l'Emission politique qui l'avaient particulièrement énervée. «C'est ma fête aujourd'hui ? C'est la sainte Marine ?» a-t-elle demandé. Interrogée notamment au sujet de la promotion au sein du Rassemblement national de l'ancien identitaire Philippe Vardon, condamné en 2007 pour incitation à la haine raciale en directeur de communication pour la campagne pour les européennes, Marine Le Pen a défendu la «liberté d'expression». Sur le passé sulfureux de Vardon, devenu vice-président du groupe RN en région Paca, elle a dit : «Aujourd'hui il a rejoint un mouvement politique pour faire de la politique, il ne veut plus faire de l'agitation. On peut être un peu radical quand on est très jeune et puis au fur et à mesure du temps on s'engage dans une voie plus calme, plus sereine et autrement efficace par ailleurs.»

Match retour

Le reste du programme de France 2 consacré à la présidente du Rassemblement national a beaucoup tourné autour de l'opposition à la politique du chef de l'Etat. Marine Le Pen veut faire des prochaines élections le match retour de la présidentielle. Elle a donc profité de l'émission pour appeler tous les électeurs «défavorables à la politique menée par Macron» d'aller voter en masse en mai. Car s'il arrive en tête, «il va se sentir pousser des ailes et il va écrabouiller les Français», a-t-elle prédit.

Quand soudain, Marine Le Pen voulant fustiger la proposition du chef de l'Etat d'instaurer un salaire minimum européen, s'est emmêlé les pinceaux. Evoquant un smic horaire en France «à 36 euros» (en réalité il est à 7,7 euros net), l'ancienne candidate à la présidentielle a expliqué que son équivalent bulgare était, lui, de «4,40 euros» (au lieu de 7,5).

«Discutailler»

Marine Le Pen a aussi jugé que le grand débat, annoncé par le président de la République au milieu de la crise des gilets jaunes, et dont la première phase se termine vendredi, n'était «pas un succès», et qu'Emmanuel Macron «ne sait pas comment en sortir». «Je ne fais pas partie de cette élite qui considère que pour se débarrasser du peuple on va discutailler un petit peu. Ce qu'il faut, dans une démocratie, c'est que le pouvoir entende» la contestation, a-t-elle ajouté.

Marine Le Pen tente depuis le début du mouvement des gilets jaunes de capter cet électorat hétéroclite mais en rejet du «système» et de la politique menée par le gouvernement. Selon un sondage Ifop-Fiducial diffusé jeudi, elle échoue pour l'instant dans cette entreprise, son parti étant désormais crédité de 21% des intentions de vote en mai, en léger recul. Jeudi soir, elle a toutefois semblé convaincre 48% des téléspectateurs, dont 63% de sympathisants de Laurent Wauquiez qui, s'ils ne portent pas le gilet jaune, n'en sont pas moins d'autres cibles potentielles pour l'extrême droite française.