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Libération
Critique

Molinier, cadavre exquis

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Théâtre. La troupe des Lucioles au festival Mettre en scène, à Rennes.
publié le 18 novembre 2003 à 1h56

Vingt-sept ans après son suicide d'un coup de revolver, Pierre Molinier en rit encore. Il l'avait d'ailleurs annoncé : «Je me donne volontairement la mort et ça me fait bien rigoler.» Il avait 76 ans lorsqu'il se tira la balle définitive, mais entretenait depuis longtemps des rapports ambigus avec les cadavres. Ainsi racontait-il comment, à 18 ans, il avait photographié sa soeur sur son lit de mort et s'était masturbé : «J'ai joui sur son ventre. Et alors comme ça, le meilleur de moi-même est parti avec elle.» Il en avait 50 lorsqu'à Bordeaux, dans le jardin de l'établissement religieux où il réalisait des travaux de peinture en bâtiment, il entreprit de photographier sa tombe et son épitaphe.

Photomontage. L'obsession première de Molinier n'était cependant pas la nécrophilie. Peintre et photographe salué par les surréalistes, il n'a cessé de mettre en scène des fantasmes centrés principalement sur le travestissement et les bas noirs. Et reste comme l'un des exemples les plus aboutis d'artiste ayant aboli tout distinguo entre sa vie et son oeuvre, n'hésitant pas à tamponner de son sperme ses toiles terminées. L'érotomane fait toujours scandale. En janvier, Alain Juppé, le maire de Bordeaux, prit la décision d'annuler une expo Molinier pourtant montrée à Beaubourg et au MoMA à New York. Partie remise : le maire s'est finalement résolu à soutenir la rétrospective annoncée pour le trentième anniversaire de la mort de l'artiste bordelais.

A Rennes ce week-end, où