On l'a vu lentement pousser depuis trois ans. Et quand on accoste enfin au musée des Arts et Civilisations par le quai Branly, c'est une longue savane tracée par le jardinier Gilles Clément, sur laquelle se greffe le mur végétal du botaniste Patrick Blanc. Derrière de hautes palissades de verre, s'esquisse le musée de Jean Nouvel. Pas de monumentalité, ni d'entrée triomphale mais six accès. Une faible densité de bâti sur 250 000 m2, pour quatre bâtiments composites. Un ensemble «au service d'une collection», mais où se reflète avec brio et subtilité les valeurs maintes fois réaffirmées par l'architecte français, notamment dans son Manifeste de Louisiana (1) : «Défendre une architecture spécifique, qui, face à l'architecture générique, révèle géographies, histoires, couleurs, végétations, horizons, lumières...». On pénètre lentement du filtre végétal dans un serpent sombre. Entretien-promenade.
Comment avez-vous appréhendé ce site ?
C'est la morphologie de ce site, la Seine, sa courbe, qui ont déterminé cette grande galerie ondulante de 200 m. Il s'agit plus d'un territoire que d'une architecture, d'un musée au milieu d'un jardin. Une forêt initiatique, où Gilles Clément a créé des courbes végétales, éclairées par Yann de Kersalé. On ne sait pas où l'on va. La galerie apparaît à travers la haute palissade de verre, imprimée de reflets, troublée par le vitrail, où sont encastrées des boîtes de toutes couleurs. On ne lit pas le bâtiment, c'est un paysage mystérieux qui protège toutes les oeuvres des civilisations que