Jamais un medium n’aura autant contribué à fabriquer de la paranoïa. Internet, réseau des réseaux, est le lieu rêvé des sciences parallèles, campagnes de désinformation et théories du complot. La Transmediale, festival d’art et de culture numérique berlinois qui explore les incidences des technologies sur notre société, a placé cette 21e édition sous le sulfureux intitulé «Conspire».
Les conspirations ne datent certes pas de l’invention du Net (même s’il facilite et accélère leur diffusion), mais leur prolifération témoigne d’un certain état de la société, où la suspicion est devenue le mode de perception ordinaire. Ce monde, de plus en plus complexe et opaque et où il devient difficile de distinguer le vrai du faux, ouvre la voie à toutes les spéculations. «Sur cette planète solitaire, il est mieux d’avoir un ennemi imaginaire que de n’avoir personne au monde», écrit l’artiste Konrad Becker.
Tout en s’employant à en démonter les mécanismes lors des conférences, dont l’une dévolue aux «politiques de la peur» menées par les gouvernements pour manipuler les opinions suite au 11-Septembre, la Transmediale ne se restreint pas aux connotations péjoratives de la conspiration, mais y perçoit également une stratégie artistique des plus fertiles. Artistes comploteurs et hacktivistes étaient réunis au salon Bilderberg, allusion au fameux groupe secret du même nom qui rassemble depuis 1954 l’élite politique, militaire et économique occidentale, souvent décrit comme un gouvernement mondia