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Libération
Critique

Tragiques mécaniques

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Moteur. A Bordeaux, le Belge Kris Verdonck propose des installations et une chorégraphie.
publié le 19 novembre 2010 à 0h00
(mis à jour le 19 novembre 2010 à 16h38)

Une masse nébuleuse, paysage de fumée ondoyant et irréel, accueille le visiteur qui s'engouffre dans «Variation VI», le parcours d'installations de Kris Verdonck, pause méditative avant de plonger dans le chaos. Le plasticien et metteur en scène flamand investit l'espace métamorphosé du TNT-Manufacture de chaussures, à Bordeaux, avec ses propositions minimales, entre art visuel, performance et chorégraphie. Certaines ont la beauté sidérante de l'apocalypse : lumière irradiante qui aveugle le spectateur, feu d'artifice qui siffle et explose en vase clos dans un fracas inouï, ou encore ce moteur à combustion, icône du XXe siècle, posé nu sur un piédestal, qui, soudain libéré de sa fonction (faire tourner les roues), se transforme en animal sauvage. Soit 250 chevaux rugissants au milieu d'une pièce dans les flammes, les explosions et les gaz toxiques, machine infernale à la fois merveille de technicité et source de tous les maux contemporains.

D'autres ont la tension d'une tragédie. Comme ce Dancer#1, sorte de broyeur en forme de L qui s'autodétruit sous nos yeux, se tortillant comme un pendu avant de rendre l'âme. Ou ce robot-piston qui tente de marcher et s'enhardit jusqu'à effectuer un saut prodigieux avant de s'étaler, puis recommence avec l'enthousiasme contagieux d'une machine en train de découvrir ses possibilités. On ressent une réelle empathie pour «ce truc qui essaie, fait des erreurs», chute et se relève. «Ce robot est comme un acteur