Devant les Giardini, qui abritent les pavillons nationaux de la Biennale, flotte un petit chalut dans lequel a été fiché un avion écrasé. Un panneau, à côté, proclamant «rien à foutre». A l'entrée, des écolos manifestent contre le nucléaire. Devant la représentation américaine gît un char d'assaut renversé. Ça et là, verre brisé, images de manifestants arabes, installation post-apocalyptiques… L'inquiétude flotte au-dessus de la 54e biennale de Venise, branchée sur l'incertitude qui a gagné le monde. En même temps, pour la première fois depuis longtemps, cette section officielle surpasse par sa force d'expression l'ensemble de la Biennale. On s'y perd souvent, dans des salles très sombres. Délibérée ou inconsciente, la figure du labyrinthe se retrouve partout. Il y a toujours des images gratuites, des propos peu intelligibles, de l'anecdote facile.
Le pavillon américain, avec sa statue de la Liberté armée et casquée en train de bronzer, est proprement désarmant. Chez les Australiens, on a affublé un pastiche du Nez de Giacometti d'un canon peinturluré à souffler les feuilles : heureusement, il a un sac doré qui plaît beaucoup aux enfants. Les sacs sont une des grandes productions de la Biennale, chacun cherchant à attirer l'attention d'une foule déboussolée par l'ampleur de l'événement. Dans le pavillon de la Chine, le seul amusement est de voir les visiteurs portant le sac rouge «Free Ai Weiwei», appelant à la libération de l'artiste con