Vers la fin du XIXe siècle, avant de mourir, l'aristocratie bourgeoise a du génie : le haut des formes conduit naturellement les contraintes, comme une cheminée bien coffrée évacue la fumée des dernières cendres.
L'héritier fortuné Gustave Caillebotte, 1848-1894, est un touche-à-tout dont les silhouettes calmes, bienveillantes et princières s'élèvent jusqu'au néant. Elles n'y vont pas, comme plus tard celles de Hopper, par excès de solitude, de vide ou de motels. Elles y sont par loisir et par grâce, dans un joli monde d'objets, de balcons, de boulevards, de jardins, de barques et de voiles, comme on rejoint cet espace neutre qui, selon Roland Barthes, est constitué de fatigue, d'ennui, de délicatesse, de silence. «Le droit à la fatigue, écrit Barthes, fait partie du nouveau : les choses nouvelles naissent de la lassitude - du ras-le-bol». La fatigue des silhouettes de Gustave Caillebotte annonce des formes nouvelles et la fin de l'écrin où elles sont suspendues.
Hauts-de-forme. L'exposition consacrée par le musée Jacquemart-André au peintre et à son frère Martial, compositeur et photographe amateur, permet de saisir la nature de leur lévitation. C'est une exposition riche : sur la soixantaine de toiles de Gustave environnées sans didactisme par les photos de Martial (lire page suivante), beaucoup sont splendides, presque toutes viennent de collections particulières.
Cinq sections suivent la vie des deux frères, ch