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Critique

Marc Desgrandchamps, la carte des déserts

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Expo . Le musée d’Art moderne de la ville de Paris consacre une rétrospective au peintre lyonnais du vide et du souvenir, présentant toiles, collages, dessins et gouaches.
publié le 26 juillet 2011 à 0h00
(mis à jour le 30 août 2011 à 17h47)

On n’embarque plus pour Cythère, puisqu’elle est là. C’est un aquarium dans le désert. Elle a un goût de bitter Campari. On la trouve au musée d’Art moderne de la ville de Paris. Son refondateur est Marc Desgrandchamps, peintre flegmatique, longiligne et lyonnais. Evénement rare dans ce pays : un type de 50 ans qui peint de longs tableaux à l’ancienne s’est fait une réputation qui lui vaut, sur sept salles et une galerie de dessins, de collages et de gouaches, une rétrospective dans une vénérable institution parisienne.

Sa Cythère débute dans les années 80 du côté de chez les expressionnistes et de chez Gauguin. Elle fait une imperceptible étape chez Dali. Assez vite, elle trouve sa géographie. C’est un étrange rivage, éloigné comme une enfance passée sur les chevaux de Tarquinia. La plage a vieilli en nonchalance, dans une mélancolie soigneuse, amusée, redressée par les formes.

Sorbet. Julien Gracq aimait et créait des personnages que le paysage rend transparents, puisqu'ils en naissent et y meurent, comme chez les romantiques allemands. Marc Desgrandchamps les peint. On voit le décor à travers ses humains amphibies, comme à travers un écran. Souvent, leurs couleurs font des coulures. Ce n'est pas négligence de peintre en bâtiment. Ce ne sont pas larmes de peintre. C'est un coulis de souvenirs qui descend le long du sorbet, dans la chaleur du temps. Les souvenirs sont des images projetées sur du vide, comme ces personnages insulaires de Bioy Casarès, le roman