Les membres du groupe de punk rock Pussy Riot ne sortent jamais en public à découvert. Elles dissimulent leurs visages sous des cagoules faites main et leurs identités sous des pseudonymes changeants. Personne n’admet jamais ouvertement appartenir au collectif. Mais trois jeunes femmes, Nadejda Tolokonnikova, Ekaterina Samousevitch et Maria Alekhina, ont dû tomber le masque il y a cinq mois et comparaître, tête nue, pâles et fatiguées, devant un tribunal moscovite. Elles sont issues du groupe d’art protestataire Voïna («guerre», en russe), célèbre à Moscou et à Saint-Pétersbourg pour ses actions scandaleuses, subversives, souvent obscènes.
Depuis 2009, Voïna a fait scission entre Moscovites et Pétersbourgeois, qui ne se reconnaissent pas entre eux et se disputent les origines de la formation. Nadejda Tolokonnikova, la plus jeune des punkettes arrêtées, jolie brune aux lèvres pulpeuses, étudiante en cinquième année de philo, en serait l'une des cofondatrices, avec son mari Petr Verzilov, en 2007. Le couple s'est fait connaître du grand public en février 2008, lors d'une performance particulièrement radicale, à la veille de l'élection à la présidence de Dmitri Medvedev : «Baise en soutien au nounours héritier» (medved veut dire ours en russe) organisée au Musée biologique de Moscou. Nadejda était alors enceinte de neuf mois. «Notre fille Guéra s'inquiète beaucoup pour sa mère», raconte Verzilov. Elle passe son temps à dessiner des plans pour libér