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Critique

Gustave Le Gray, cercle vertueux

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Calotype . Au Petit Palais, une expo revient sur l’essor de la subjectivité chez les pionniers de la photo.
«Neige au Champ-de-Mars», vers 1835, d'Henri Le Secq. (Photo Les Art Décoratifs. Paris)
publié le 9 novembre 2012 à 22h16

Un cul blanc et épineux. De vache. Qui nous fait face (le cul, pas la vache). Un sujet volontairement laid, mais cadré comme il faut, avec une roue en amorce dans l'image, à droite. C'est un inédit de Charles Nègre, bien connu pour ses Ramoneurs en marche (1851) et qui fut peintre, soucieux de ses compositions, roi des diagonales. Dans Porte des châtaigniers, Arles (1852), il fait presque souffler le mistral sur les quais empierrés du Rhône.

Augure. L'exposition «Modernisme ou modernité. Les photographes du cercle de Gustave Le Gray (1850-1860)» illustre un chapitre bien connu de l'histoire de la photographie, celui des «photographes ayant fréquenté Le Gray» et désireux de fonder la photographie comme un médium à l'esthétique propre. Pour Charles Nègre, John Beasley Greene, Henri Le Secq, Auguste Salzmann ou Adrien Tournachon, il s'agit de «poser les bases d'un médium affranchi des Beaux-Arts», comme l'indiquent Anne de Mondenard et Marc Pagneux dans l'introduction du catalogue (1).

En 1850, la photographie n’a que dix ans d’âge, mais ses progrès techniques sont tels qu’on est proche de l’instantané : le photographe n’est plus un organisateur de scènes posées. La puissance et la singularité de son regard passent au premier plan, il est l’augure découpant des morceaux de réel dans l’insignifiant. Gustave Le Gray, qui n’est pas encore la star du genre «marine» (il n’y en a qu’une exposée ici), a, comme tous les opérateurs, sa