On s'était dit qu'on intitulerait l'article «Poil incarné», si l'on revient en mai pour l'expo néomonographique de Sylvia Sleigh : il est 15 heures il y a quinze jours, et Alexis Vaillant, le responsable de la programmation du CAPC (Centre d'arts plastiques contemporains) de Bordeaux, détaille le programme de l'année, avec une rallonge de 150 000 euros pour ses 40 ans.
Et il s'arrête longtemps sur Sylvia Sleigh, inconnue au bataillon, dont la toile reproduite dans le dossier de presse laisse supposer le pire, une sorte de David Hockney féminin qui aurait rencontré le Douanier Rousseau. «Son œuvre demande un moment d'adaptation dans la réception», glisse Vaillant, se foutant de notre gueule ou pas, on ne sait. «Elle peint en particulier les poils masculins avec une grande minutie.» Et c'est vrai qu'en allant faire un tour sur le site de la Tate Liverpool, où la rétrospective Leigh est présentée avant d'arriver à Bordeaux, horripilation garantie.
La Galloise Sylvia Leigh (1916-2010) était l'épouse de Lawrence Alloway, curateur au Guggenheim et inventeur du terme pop art. Ses peintures «réalistes» représentent la faune culturelle de la côte Est des années 60 et 70, sapée et désapée, avec une prédilection pour le nu masculin, genre qu'elle entendait mettre en balance avec le sexisme du nu féminin. «C'était pour justifier, ou plutôt ne pas justifier, qu'on nous traitait comme des objets. Je voul