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Libération
grand angle

Kitsch ou double

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Visite de l’atelier tout en briques et paillettes des artistes Pierre et Gilles qui, depuis près de quarante ans, célèbrent l’union entre la photographie et la peinture.
Le photographe Pierre Commoy (cigarette) et le peintre Gilles Blanchard dans leur salon. (Photo Guillaume Herbaut)
publié le 22 avril 2013 à 19h06

La petite rue du Pré-Saint-Gervais, au nord-est de Paris, est déserte. Face à un jardin ouvrier, un immeuble industriel. Les rares passants contournent l’entrepôt de briques réaménagé d’où, à travers les fenêtres du rez-de-chaussée, l’on décèle des scintillements. Une fois à l’intérieur, au-delà des sourires des affables occupants, Pierre et Gilles, et les aboiements de deux petits chiens, place à l’aveuglement.

Dans de grandes pièces, sur plusieurs étages, l'œil se perd, largué, ne sait pas où se poser. Sur les carreaux hispanisants de la cuisine ? La télévision allumée en permanence, comme dans une loge de concierge ? Ou alors sur les sculptures de dieu hindou, de Batman, de Goldorak ? Un meuble emprisonne des poupées, un tapis reproduit un circuit automobile, les paillettes dorées d'une tour Eiffel de 2 mètres de haut étincellent. L'inventaire, celui d'un Perec hystérique, pourrait être sans fin, et il faut s'attarder sur les murs pour comprendre où l'on est, face à des dizaines de photos, encadrées et dédicacées par Sylvie Vartan, Mireille Mathieu, Valérie Lemercier, Madonna, mais aussi par des acteurs pornos comme Aiden Shaw et autres bellâtres anonymes ou extravagantes demoiselles. Tous sont venus ici, dans ce bâtiment gris et son petit monde merveilleux, objet d'un ouvrage : Derrière l'objectif de Pierre et Gilles (1).

Comme deux héros de Jacques Demy

Assis dans leur salon, allumant des cigarettes avec le briquet promotionnel d'un sex-club gay parisien, déposant les cendres dans une sculpture