Ils ne fêteront pas leur vingtième anniversaire à New York. Ce dimanche, à Phnom Penh, les deux hommes agenouillés qui ont accueilli dix-neuf ans durant les visiteurs de l’aile asiatique au Metropolitan Museum sont restitués au Cambodge, dans une cérémonie présidée par le Premier ministre, Hun Sen. Leur sourire désarmant cache une blessure longtemps gardée secrète. Pour ceux qui y prêtaient attention, ils portent des marques de burin : les traces laissées par les pillards quand ils ont arraché ces personnages grandeur nature d’un temple dans la forêt cambodgienne, il y a une quarantaine d’années.
Le 3 mai, le musée new-yorkais a jeté un certain tumulte à travers les Etats-Unis en annonçant son intention de rendre ces grès sculptés au Xe siècle. Ce geste est le résultat d'un processus dans lequel l'histoire de l'art tient le beau rôle. Il témoigne aussi de la radicalisation de la position américaine envers le trafic d'art. Embarrassé par un passé qu'il aimerait bien solder, le musée a expliqué, dans un communiqué laconique, sa décision par «de nouvelles données de recherche», prenant soin d'ajouter que «ces informations n'étaient pas disponibles quand il acquit ces sculptures», il y a plus de vingt ans. Le Cambodge, qui avait déposé une réclamation en mai 2012, s'était immédiatement félicité de ce «comportement éthique».
Les événements se sont accélérés au printemps. En mars, la directrice juridique, Sharon Cott, s’est rendue à Phnom Penh f