Menu
Libération
INTERVIEW

«On savait que le père de Cornelius Gurlitt trafiquait»

Article réservé aux abonnés
La galeriste et historienne Elizabeth Royer explique l’origine de l’incroyable butin de biens spoliés aux Juifs, récemment retrouvé à Munich.
La plaque de Cornelius Gurlitt sur la porte de son domicile à Salzburg, le 6 novembre 2013. (Photo Dominic Ebenbichler / Reuters)
publié le 7 novembre 2013 à 20h16
(mis à jour le 8 novembre 2013 à 11h06)

C'est la plus grande collection d'art volé qui vient de sortir du secret, cette semaine, grâce aux journalistes du magazine allemand Focus (Libération de mardi). Pas moins de 1 406 toiles et dessins retrouvés par les autorités allemands, par hasard, en 2012 - des Picasso, Matisse, Chagall, etc. planqués dans un appartement à Munich… Un incroyable butin en possession de Cornelius Gurlitt, un octogénaire qui a récupéré la collection de son père, détruite selon la famille Gurlitt par les bombardements alliés à Dresde. Elizabeth Royer, historienne d'art et galeriste à Paris, a fondé Harp Europe (Holocaust Art Restitution Project) qui, en fusionnant avec Harp USA, rassemble les archives des biens spoliés aux Juifs.

Vous êtes surprise de l’incroyable découverte dans l’appartement de Cornelius Gurlitt à Munich ?

Je connais très bien l'histoire des Gurlitt. Le père, Hildebrand, à moitié juif, était un grand recycleur des tableaux qui venaient de Belgique, de Hollande, de France. Tout le monde savait qu'il était impliqué dans le marché illicite des tableaux spoliés dès les années 30. Il travaillait pour les nazis, vendait pour eux les œuvres volées aux Juifs ou prises dans les musées. A l'été 1945, les troupes britanniques ont découvert, dans une cache à Hambourg, une collection de tableaux, de dessins et d'objets d'art enregistrée au nom de Gurlitt. Ils l'envoient au centre de rassemblement de biens culturels de l'Armée américaine. Les enquêteurs soupçonnent que certains proviennent de pillages en France, en particulier un tableau de Marc Chagall, Scène fan