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Peinture

Sigmar Polke, entrelacs des signes

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Au travers d’une rétrospective de 130 de ses œuvres les plus récentes, le musée de Grenoble met en avant les travaux expérimentaux du peintre allemand, mort en 2010.
«Leonardo», 1984. (Photo The Estate of Sigmar Polke/ADAGP)
publié le 7 janvier 2014 à 18h16

Que peut-on voir dans les tableaux de Sigmar Polke, tels qu'exposés jusqu'à début février à Grenoble? Un déni de la couleur (profondeur, lumière) par le trait, et vice-versa. Une sorte de contrariété intrinsèque élevée au rang d'ironie vitale. Par exemple dans Leonardo (1984), laque sur toile haute de 2 mètres. On perçoit, sous un embrouillamini de coulures qui forment une sorte de test de Rorschach, le visage de Léonard de Vinci tel que lui-même nous l'a laissé, autoportrait vieux et barbu archiconnu, objet kitsch de cartes postales et de pubs pour école de marketing. Mais très peu : on le distingue à peine.

Dans le quart supérieur gauche, une sorte d'autre visage inversé, lunaire, fronçeur, prend place dans la sphère du crâne à la faveur de taches hasardeuses, translucides. Leonardo est en outre parcouru de vastes demi-cercles, dans une sorte de fausse symétrie rouge, bleu, jaune et vert - et, puisqu'on parle de Rorschach, on y voit encore une ronde de Schtroumpfs chapeautés et bras en l'air, un sous-bock géant marqué d'empreinte de verres. Ou pas. Et, en s'approchant, de la matière grattée, gaufrée, griffée. Des résidus ou des traces : geste humain ou vie secrète du pigment inerte ? La main a envie de plonger dans les craquelures de Bonnet de nuit I (1986), paysage d'orage piqué à Giorgione et peut-être abandonné sous un évier qui fuit. On pense à la peinture en deux dimensions du symboliste Gustave Moreau, vérité toute à la surface, dénuée d'arr