Comme on avait vu «à peu près tout» de son œuvre au musée d'Art moderne de la Ville de Paris et que Douglas Gordon, 47 ans, déborde de tatouages de tous les côtés, on a eu envie de lui demander d'en parler. On s'est demandé si l'accumulation, l'archive, les corbeaux jouaient aussi à même la peau. Un peu surpris, il s'est exécuté, a déboutonné sa chemise, a raconté chacun d'eux en détail. C'est donc, en regard de l'installation du musée, «à peu près tout» sur sa vie, «de 1992 jusqu'à aujourd'hui».
Epaule gauche : «Le premier tatouage, c'était en 1993, je crois, plus ou moins lorsque j'ai fait ma première exposition, ou intervention, ici à Paris. Il est très petit et il dit Trust Me ("Aie confiance en moi"). J'ai grandi dans une famille de témoins de Jéhovah et j'avais envie d'un tatouage, c'était le seul truc pour lequel ma mère disait toujours non. J'ai travaillé quelque temps sur sa typographie et je suis allé chez un tatoueur de Glasgow nommé Terry Tattoo. Terry, c'était le nom du proprio, vous imaginez le truc. Donc j'arrive au salon de tatouage avec mon petit bout de papier dessiné. C'était vraiment comme au bordel, non que je sois un habitué des bordels, mais… Terry demande : "T'as déjà fait ça ? [d'une voix de fausset, ndlr] - Non. - C'est gros comment ? [Il fait mine de tendre un papier]. Trop petit, je peux pas faire, dégage." C'était comme si on m'avait émasculé. Finalement, c'est le fils de Terry qui l