Alors que la Fondation Vuitton commence sa danse des douze voiles, les tuyaux du centre Pompidou soutiennent cet envol avec une rétrospective consacrée à l’auteur de ce bâtiment, l’architecte américano-canadien Frank Owen Gehry, né en 1929 à Toronto. Il a accédé au rang d’icône en signant un emblème mondial, le musée Guggenheim de Bilbao (Espagne), un musée d’art contemporain, porte-étendard de toutes les villes en mutations, économique et urbaine. Le musée de Bilbao est devenu un «effet», le graal de tout maire qui désire un objet spectaculaire identifiant sa cité. Mais, comme pour la plupart des architectes, la longue trajectoire de Gehry est méconnue.
C'est d'abord sa voix, saisie dans un entretien filmé, qui happe le visiteur à l'entrée de l'exposition. Il affirme à un moment : «Je ne suis pas légitime.» Lui, la star mondiale ? C'est là que twiste, comme ses bâtiments, un paradoxe permanent entre l'œuvre et l'homme. Entre une continuité puissante d'édifices artistico-industriels explosés, de réalisations hyper décoratives, narratives, organiques, prêtes à vous avaler, que vous soyez cheval, poisson ou oiseau, à vous pousser au galop, à la nage, à l'envol, à l'arrêt, extatique. Ou dubitatif. Et un homme qui ne joue ni au démiurge ni au maudit, plutôt à l'artisan artiste, attachant, se présentant tel un Don Quichotte qui continue à douter pendant ses projets. Dans une quête vers toujours plus de complexité, torturé par l'inachèvement.
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