Si un enfant triste appuie sur ses paupières face au soleil, si un homme ensommeillé se relève trop brusquement, ils voient trente-six chandelles. Il y a une recherche et comme le programme de cet éblouissement dans le travail de Sonia Delaunay, solide juive ukrainienne devenue en France la créatrice, l'égérie et la couturière du «simultanéisme», l'artiste de l'abstraction vitale et perpétuellement recyclée. C'est la femme qui jette sa palette à l'eau et qui fait des ronds dans l'air. Ou des carrés sur tissu. Ou des losanges dans le bois. Peinture, robes, bonnets, fuselage, marqueterie : entrons dans les établissements Delaunay, épicerie fine de la couleur.
Le surréaliste René Crevel lui rend visite en 1925, elle est alors connue pour son travail vestimentaire. La description qu’il fait de l’atelier dépeint l’atmosphère qui flotte dans la rétrospective, au musée d’Art moderne de la Ville de Paris. Adultes et enfants s’y déplacent en masse. Ils circulent avec plaisir le long d’un circuit dont l’architecture, les contrastes, le mélange d’angles et d’arrondis, épousent intelligemment le rythme et l’énergie de cette artiste des temps modernes.
Itinéraire. Tableaux criards et robes immettables, films Belle Epoque et poèmes passés au prisme, photos de garçonne qui fume et fresques pleines de chic industriel : le visiteur passe les frontières et marche sur les couleurs comme si, d'une guerre à l'autre, de boucherie en génocide, le miracl