Telle une soucoupe volante, l’œuf au plat a bipé sur les radars de notre environnement visuel. Non pas l’œuf dur, l’œuf à la coque ou l’omelette, mais bel et bien l’œuf qui s’écrase, cuit par le dessous et cru sur le dessus, avec du jaune au centre et une auréole de blanc tout autour. Un ange de motif, débarqué avec son armée de clones, vus sur les blogs, sur Pinterest, les photographies culinaires ou les imprimés. Il a fallu se rendre à l’évidence la semaine dernière, lors de la parution d’une campagne publicitaire pour Uber. Sur le visuel, une jeune femme assise sur la banquette arrière d’un van est accompagnée par un œuf au plat géant. Elle vient d’acheter cette sculpture (factice), aussi grosse qu’un bœuf, et rentre satisfaite à la maison. Alors, l’œuf au plat, un «motif gadget» de plus, en vogue comme les bananes, les ananas, les pizzas ou les hamburgers ? Une banalisation visuelle ou un concentré d’art pur ?
Beau universel
Frédéric Leclerc, directeur artistique, et Pierre-Antoine Dupin, concepteur-rédacteur de l'agence Marcel, responsables de la campagne pour le prestataire de VTC, évoquent le processus avant l'œuf : «On a cherché une œuvre qui soit grosse, simple, facilement décodable, qui prenne de la place et puisse rentrer sur la banquette arrière d'une voiture. Il fallait qu'elle soit lisible en un quart de seconde, soit le temps que l'on met pour décoder un graphique.» Sur la photo, effectivement, on ne voit que l'œuf au plat, absurde et mystérieux, sous l'œil indulgent d