«Une belle bande d'emmerdeurs», c'est ce qu'on entend souvent au sujet de feu le collectif Bazooka, gang de graphistes punk ayant, entre autres, officié à Libération entre 1975 et 1977. Le 22 août, l'ancienne bande de keupons a perdu l'un de ses membres fondateurs, Philippe Renault, alias Lulu Larsen, dessinateur, graphiste et artiste tous supports, comme il aurait pu se décrire lui-même.
Né en 1954, Larsen a changé de vie le jour où il a croisé Olivia Clavel, Christian Chapiron (Kiki Picasso), Jean-Louis Dupré (Loulou Picasso) et Bernard Vidal aux Beaux-Arts de Paris dans des ateliers sans professeur, sans autorité. Foutre le bordel (euphémisme les concernant), c'était la ligne directrice. Ensemble, ils veulent lancer des «cocktails molotov graphiques». Bazooka productions est fondé en 1975. Accueilli à Libération par Serge July, le collectif veut dynamiter le journal qu'il juge endormi sur ses lauriers et va s'en donner à cœur joie. Ils livrent des unes violentes, écrivent dans les marges, tapent là où ça fait mal.
A la fin de Bazooka, en 1979, Lulu Larsen touchera à tout : affiches de concert, livres pour enfants, dessins au pochoir, à la bombe, fresques sur des bâtiments institutionnels. «Lulu et les Bazooka ont fait bouger les lignes dans l'édition, ont grandement participé au mouvement des autopublications, par exemple», rappelle Pierre Ponant, professeur aux Beaux-Arts de Bordeaux et vieil ami de Larsen, qui, se souvient-il, ne sortait jamais sans carnet ni crayon à la main, les meilleurs des cocktails molotov. .