Chaque année, le 7 septembre, au kilomètre 129 de la route nationale 12, province d'Entre Rios, Argentine, on peut assister à une étrange procession. Dans une débauche de fleurs multicolores, des milliers d'Argentins viennent rendre hommage à Gilda «la miraculeuse». Professeur des écoles puis chanteuse de cumbia, Gilda voit sa popularité exploser dans les années 90 avec son tube No me arrepiento de este amor («je ne regrette pas cet amour»). Le 7 septembre 1996, au sommet de sa carrière et à seulement 35 ans, elle meurt dans un accident de bus sur la route 12. Le bruit court que Gilda accomplit des miracles. Dans une Argentine bigote où le sacré fraie joyeusement avec le profane, Gilda est rapidement sanctifiée et ses fans deviennent des fidèles, lui demandant fertilité, amour et réussite.
Pendant trois ans, Gisela Volá, photographe argentine et membre fondatrice de la coopérative Sub, documente l'univers visuel de la «sainte de la cumbia». «A la différence des chanteuses de l'époque en mini-jupe et bottes de cuir, Gilda s'est créé un monde fantastique inspiré de guerrières portant fleurs et capes. C'est ainsi qu'elle est vêtue sur son dernier disque, Corazón valiente, où elle pose sur un cheval, symbole de révolte et de liberté.» Prônant amour et respect de l'autre, la musique de Gilda transcende les classes sociales et trouve un écho particulier auprès des communautés LGBT.
Et Gisela, croit-elle en Gilda ? «La seule façon pour moi de plonger dans ce monde a été d'apprendre à croire. Lors de l'inauguration de l'exposition, ses fans m'ont offerts une multitude de fleurs. Le lendemain, je les ai déposées au cimetière de Gilda, en signe de gratitude.»