«La plupart de nos amis se réfèrent à nous comme une famille joyeuse et fonctionnelle, sous acide.» Kate Steffens n'a pas eu une enfance conventionnelle. A la place de la messe, elle et son frère, Devon, assistent le dimanche à quatre heures d'un show radio fiévreux, en présence des pointures du reggae. Derrière le micro, leur génial daddy, Roger Steffens. Acteur, écrivain puis producteur, il est surtout connu pour détenir la plus large collection de matériel sur Bob Marley. Il est aussi photographe et tient, sans prétention, un journal visuel de son quotidien californien.
Il y a quelques années, Devon repêche dans l'une des six pièces de la maison dédiées aux archives ces négatifs délaissés. Il scanne plus de 40 000 Kodachromes que sa sœur enthousiaste poste sur Instagram. C'est un succès immédiat, The Family Acid dépasse vite les 20 000 abonnés et fait le tour des médias américains. Avant d'épouser les pages d'un livre coloré. Le résultat : une joyeuse immersion dans la contre-culture américaine des années 60 et 70, à la rencontre de ses poètes, musiciens, militants pacifistes. Et une déclaration d'amour au LSD à une époque où, encore autorisé, son apôtre Timothy Leary le distribue dans les universités et conduit des tests sur la conscience.
Steffens tente de récréer en image les effets du précieux hallucinogène : «L'acide a changé ma vie en 1966. J'ai cherché des manières d'illustrer le côté multidimensionnel de mes trips en photo, grâce à la double exposition notamment.» Une histoire terminée ? «Il y a deux ans, pour mon 71e anniversaire, j'ai pris de l'acide pour la première fois depuis trente ans. C'était merveilleux.»