Depuis le 1er janvier, les habitants de onze pays sont liés par une
même monnaie, l'euro. Ils ne la manipulent pas encore il leur faudra attendre les premiers jours de 2002 , ce qui rend très abstrait cet événement «historique». Pourtant, dès 1999, comme ce cahier tente de le démontrer, la monnaie unique va modifier leur vie quotidienne.
Pour la première fois, les Européens disposent en effet d'un étalon pour se comparer. Comparer les prix, mais aussi les salaires, les coûts, les impôts, les tarifs publics" Cette faculté nouvelle ne manquera pas d'infléchir les comportements des consommateurs, des entreprises et des citoyens.
Jusque-là, les variations de changes décourageaient toute comparaison. A quoi bon, dans une firme européenne, s'indigner d'être payé 7% de moins qu'un collègue allemand lorsque les variations du mark pouvaient rendre l'estimation caduque en quelques jours? A quoi bon éplucher les prix d'un catalogue d'automobiles italiennes quand la lire jouait au yo-yo? Même limitées par les mécanismes du système monétaire européen, les incertitudes de change étaient une brume sur la vie économique du continent.
Depuis ce week-end, cette brume s'est brusquement levée, et un immense marché de 290 millions d'habitants apparaît à nu. On se rend alors compte que ce marché est éclaté, disparate, fait d'inégalités et d'écarts de développement.
Les entreprises vont, bien sûr, exploiter ces disparités, ce qui ne sera pas sans effets douloureux pour les entreprises ou les régions