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Chez Francis «Il y a eu un problème avec la gazinière».

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Dans la nuit du 19 avril 1999, la paillote d'Yves Féraud est incendiée. On retrouve sur place des cagoules, des talkies-walkies...
publié le 13 juillet 1999 à 23h43
(mis à jour le 13 juillet 1999 à 23h43)

Ce soir de mai, il fait frisquet sur Ajaccio. Qu'importe, la ville est dehors, en fête. Pour le bonheur de quelques limonadiers, pas loin de faire les trois-huit. Dans les rues, c'est la liesse des grands jours. En une affaire, le palais de justice de la ville est devenu le dernier salon où l'on cause. Le dernier endroit où la foule vient s'agglutiner. Comme à un spectacle, avec les silencieux, qui n'en pensent pas moins; les clapeurs, qui applaudissent; et les vengeurs, terribles, qui insultent les avocats à la sortie du bâtiment. En choeur, on chante: «Bonnet le jour, cagoule la nuit».

Derrière le tribunal, un petit groupe fait le guet. Pour surveiller les allées et venues, les voitures de police, les motards qui vont et viennent en trombe. Les curieux n'ont qu'un but: voir Bernard Bonnet, le déchu, une ultime fois. Bonnet, le préfet mis en examen pour une histoire débile. Une paillote incendiée, parce qu'illégale. Une paillote parmi deux cents autres. Mais, au milieu de la foule, c'est une autre silhouette qui se profile. Petite, grassouillette. Le visage est joufflu, le regard perdu. L'homme marche lentement, un peu hagard, comme étranger, détaché. Un homme qui sourit mollement quand ses amis d'hier ou du jour le saluent et le félicitent. Et auxquels il ne sait visiblement pas quoi répondre. Juste dire: «ça me dépasse.» Mais il est là, héros malgré lui d'une île. Il est là, comme les autres, à scruter la fenêtre du bureau du juge Cambérou, la seule à être encore allumée.