Après les «déodorants intégraux», gélules que l'on avale pour
supprimer toutes les odeurs du corps et «procurer une hygiène parfaite», après un appareil pour détecter le degré de mauvaise haleine, voici maintenant, annoncé par une société japonaise, un extraordinaire projet de chasse aux odeurs: celles des personnes âgées! Dès septembre, il sera possible de se procurer toute une gamme de shampooings, poudres, lotions, susceptibles de mettre en échec la substance responsable d'une odeur qui caractériserait la vieillesse. Cette annonce est très caractéristique du souci contemporain d'effacer tout ce qui peut rappeler la dégradation corporelle et, au bout du compte, la mort. Loin d'être indifférentes aux odeurs, nos sociétés économiquement développées, souvent qualifiées d'«odoriphobes» car devenues hypersensibles à certains effluves jugés mauvais, sont bien décidées à leur donner, non plus de «petites claques» mais un grand coup de balai.
Le sentir bon et jeune étant en passe de devenir un impératif catégorique, la hantise de «sentir mauvais» peut même conduire à des attitudes pathologiques. Phobies et névroses olfactives seraient en net développement. Obsédés par la conviction d'émettre des relents nauséabonds, certains individus font un usage frénétique de douches et de déodorants et vont jusqu'à se retrancher de la société de crainte de voir «froncer le nez» sur leur passage. La place accordée à ces fantasmatiques émanations est révélatrice du rôle essentiel de l'odorat dans