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Libération

EMPLOI. Au bureau pour vivre gay, vivons cachés.

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Rares sont les univers de travail où l'homo-sexualité est acceptée. D'autant que l'homo-phobie, latente ou exprimée, n'est pas sanctionnée par la loi .
publié le 22 novembre 1999 à 1h37
(mis à jour le 22 novembre 1999 à 1h37)

Ce sont des réflexions dites pour rire mais qui virent facilement à l'offense. Apprenti chocolatier dans une boutique parisienne, Fabien a subi un an durant les bonnes blagues de son collègue: «Elle est où Fabienne?», «Elle fait quoi, la grande folle?» Le plus souvent, il laisse filer. «Je m'en fichais. On en rigolait. Mais à force, ces vannes m'ont piqué le moral. Un jour, mon collègue est allé trop loin. J'ai foncé sur lui, l'ai soulevé et enfermé dans l'énorme congélateur, en poussant le bouton jusqu'à -22. Il hurlait "laisse-moi sortir. Et moi je lui répondais "tant que tu n'auras pas dit pardon.»

Au travail, les blagues homophobes font partie de la vie du bureau, et l'homosexualité se vit le plus souvent cachée. A la télé, dans les magazines, dans la société, les gays et lesbiennes ont pourtant gagné en visibilité. De la dépénalisation de l'homosexualité en 1982 à l'adoption du Pacs cette année, le seuil de tolérance s'est relevé. Mais le monde de l'entreprise semble étanche à ce mouvement. Quel grand ou petit patron s'aventurerait à dire qu'il est homosexuel? Aux Etats-Unis, le vice-président de la banque d'affaires Merrill Lynch n'hésite pas à inciter les étudiants d'Harvard à vivre librement leur sexualité (lire p. V). En France, l'homosexualité est quasi invisible au bureau. Elle relève largement du tabou. Les inspecteurs du travail rencontrent très rarement de discriminations liées à l'homosexualité, les prud'hommes jugent peu d'affaires. Aucun chiffre, aucune enqu