Pristina, envoyé spécial.
Des promeneurs matinaux le croisent parfois en train de courir, entouré de ses gardes du corps, dans un petit bois boueux sur les hauteurs de Pristina. Ce jogging, bihebdomadaire quand il le peut, est la soupape de l'administrateur de l'ONU et la providence des photographes. Le reste du temps, installé au siège de la Minuk (Mission des Nations unies pour le Kosovo), douze heures par jour et souvent plus, Bernard Kouchner tente de gérer l'ingérable avec une énergie reconnue même par ses détracteurs. Sur le papier, ses pouvoirs sont immenses sur un Kosovo devenu de fait un protectorat. Même si le mot lourd de relents coloniaux l'irrite, il est une espèce de «gouverneur». En tant que patron local de l'ONU, il chapeaute les trois autres piliers de la mission internationale (OSCE, UNHCR et Union européenne) qui doit reconstruire l'économie et créer les institutions d'un Kosovo bénéficiant d'une «autonomie substantielle» au sein de la Yougoslavie. C'est du moins le mandat fixé par la résolution 1 244 du Conseil de sécurité (lire ci-dessous). Le French doctor paie de sa personne. Il lance des cris d'alarme pour obtenir des rallonges à un budget qui dépend encore totalement des pays donateurs, et en premier lieu des Européens. Il se bat pour obtenir des renforts pour la police internationale. Ses fonctions l'obligent à animer d'interminables réunions entre organisations internationales ou à tisser de difficiles compromis entre les leaders albanais. Dès qu'i