Serge Paugam est sociologue, directeur de recherche au CNRS et
membre de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale. Il est l'auteur du Salarié de la précarité, les nouvelles formes de l'intégration professionnelle (1).
Quelle a été votre réaction à la proposition du Medef de créer un contrat à durée déterminée de cinq ans?
J'ai été très surpris. Je ne pensais pas que le patronat allait oser jouer cartes sur table. Toutes les tentatives récentes pour maximiser la flexibilité ont fait l'objet de critiques importantes de la part des syndicats. Et on connaît bien les effets de la précarité sur la vie sociale, familiale. Bien sûr, on peut penser qu'un contrat de cinq ans c'est mieux, c'est-à-dire moins précaire, qu'un contrat d'un an ou de dix-huit mois. Mais pour juger correctement de la précarité d'un salarié, il faut intégrer d'autres paramètres que la durée inscrite au bas de son contrat, notamment sa relation au travail, les rapports sociaux dans l'entreprise où il se trouve. Tous les précaires ne sont pas dégoûtés de leur travail. Tout dépend de leur degré d'intégration dans l'entreprise. La précarité devient scandaleuse si les salariés qui en font les frais n'ont aucun moyen d'expression et de participation à la vie de l'entreprise. Lorsqu'ils ne peuvent accéder à une véritable formation. Dans ces conditions, les salariés ne peuvent envisager une carrière, ni prévoir leur avenir personnel. Il y a alors un risque qu'ils soient relégués dans un sous-gro