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Libération

EMPLOI. Chronique de la vie d'usine. «Pendant ma première grève, j'étais morte de trouille».

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publié le 29 mai 2000 à 0h44

Delphine, une ouvrière de 25 ans, vient de vivre sa première grève.

Beaucoup de stress, mais des résultats.

«Je travaille dans cet atelier de couture depuis neuf mois seulement. Je suis une des dernières arrivées. Il faut dire que depuis de nombreuses années la tendance était plutôt aux licenciements qu'aux embauches. Aujourd'hui, il y a de plus en plus de pièces à livrer, alors les patrons ont recruté, mais ça n'a pas suffit. On est trois nouvelles, on a dû s'habituer aux machines, au travail, à l'atelier et on a pas réussi à faire notre production. Tout s'est accumulé et les patrons ont piqué leur crise. Ils ont menacé tout l'atelier, nous ont raconté que si on n'allait pas plus vite, ils délocaliseraient l'usine en Chine. Les fortes têtes ont pété les plombs. Depuis le temps qu'elles attendaient ça, avoir une bonne raison de se mettre en grève. D'autant que les 35 heures et les jours de congés supplémentaires, ça n'existe pas dans cette boîte. L'engueulade a fini de mettre le feu aux poudres.

«Tout a démarré un lundi à 10 heures du matin. L'ouvrière la plus âgée a arrêté sa machine à coudre, poussé au sol son tas de pièces à assembler et s'est levée. Toutes les filles ont suivi et nous, les trois petites dernières, on n'a pas eu le choix. En avant, avec les autres. J'étais complètement paniquée. Qu'est-ce qu'ils vont dire les gens, en apprenant que j'ai arrêté le boulot. On passe vite pour une feignasse dans le coin. On est toutes sorties avec nos blouses bleues, moi je m