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Libération

La vague : l'été grec de Gladys (Fin)

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D'après photo
publié le 12 août 2000 à 3h22

Prenez n'importe quel imbécile, montrez-lui une photographie d'un enfant enfoui dans le sable (Libération du 28 juillet 2000), il ira dans sa bibliothèque décrocher le texte d'Oh les beaux jours de Samuel Beckett et vous servira une tirade frelatée sur les didascalies, le vieux style, Madeleine Renaud et tout le saint-frusquin, il fera le malin en feignant d'en réciter des bouts par coeur qu'il lui aura suffi de recopier et s'en tirera avec une pirouette que je vous épargne. On voit bien que ces gars-là n'ont jamais assisté à la naissance d'une sirène.

La sirène est un animal mi-chair, mi-poisson, dont la femelle est réputée pour sa beauté, la magie de sa voix, et dont le mâle est si discret que beaucoup ignorent son existence, au point que l'on croit que seule la parthénogenèse assure la pérennité de l'espèce. Il n'en est rien: autant la sirène est élégante, avec son buste de jeune fille et sa queue de poisson, autant le mâle est laid avec son torse de veau de mer, ses jambes humaines et, sauf votre respect, ses parties génitales pendinolentes et ramollies par le séjour aquatique (Jérôme Bosch en a peint). Car l'anatomie sépare les deux sexes et les force à évoluer dans des milieux contraires: les femelles, très bonnes nageuses, respirent dans l'air à l'aide des superbes poumons que l'on sait, tandis que les mâles, piètres nageurs, en sont réduits à vivre sous l'eau pour cause de branchies. Ainsi, on peut voir sur nos plages de langoureuses femelles alanguies prenant le frai