L'ami Momo qui, souvent la journée, plâtre bien et peint aussi, a trouvé un joli hobby pour occuper ses rares heures chômées: il organise des safaris provençaux dont le but n'est autre que d'occire quelques insectes trop célèbres. Ce jeune entrepreneur de la région du Ventoux a en effet vite assimilé que le repos de l'urbain était sacré et ne souffrait aucune contrariété: le hamac oui, le rosé aussi, mais la pollution sonore de bestioles qui font crisser leurs ailes ou leurs cuisses, non. Non.
«Cette torture mentale ne pouvait plus durer», nous confiait récemment un cadre dirigeant. Alors, Momo apprend d'abord aux vaillants chasseurs à reconnaître les cibles. Pour éviter les bavures. Un modèle géant, en vente sur tous les bons marchés du sud du pays, donne une vision réaliste de la cigale. En plus, en lui appuyant sur le ventre, et si la pile fonctionne, il émettra pendant quelques secondes l'odieux crincrin caractéristique de cette détestable engeance. Il faut bien cela pour lutter efficacement contre la calamité.
Equipé ensuite d'une carabine à manche de bois et d'un carquois rempli de fléchettes, ne reste au justicier, lâché en pleine nature, qu'à battre pinèdes et bosquets. Un véritable petit Viêt-nam modèle réduit, car l'ennemi est là, mais on ne le voit pas. Tout juste l'entend-on, jusqu'à en devenir fou. Ou jusqu'à tirer enfin juste, dans le ventre, là où ça fait mal. Vite, le tableau de chasse prend des allures bruegeliennes, et serein, la conscience apaisée, Tartarin