Jean-Piotr vient de se faire larguer. Salement. Par sa femme, ce n'est pas le plus grave, qui lui a crié au téléphone qu'elle n'en pouvait plus de ses perversions; puis par son employeur, quelques minutes plus tard, qui lui a demandé de ne pas revenir, en se plaignant encore une fois de ses manquements au code de conduite de la start-up. «Ah, pense Jean-Piotr, cette nouvelle économie, une vraie saloperie, et ce CEO, quel con de Suédois...» Malgré le soleil qui luit comme le ventre d'un bourdon, il comprend que sa vie est en train de tourner vinaigre. Alors, Jean-Piotr dont la mère était slave décide de s'en payer une bonne tranche, au diable l'avarice, chez un restaurateur qui ne craint pas la comparaison. Admirable, disait la chronique mondaine. Notre héros n'hésite pas, car c'est un petit jouisseur. L'endroit ne sert que du bar, poisson à la chair fine, et du boeuf, animal à la classe folle. Le tout récent licencié fait probablement là l'un des plus beaux repas de sa jeune carrière. Oubliant la souris et l'argent facile du click'n mortar, il se convertit rapide au drink'n coltar: scientifiquement, il s'enfile les verres de bon vin comme hier encore il pensait accumuler des stock-options. Il est heureux, se sent même des jambes de fringant après un dessert sublime et décide de s'enfuir en courant, comme il y a vingt ans, quand il faisait déjà le ragondin à Raon-l'Etape. C'est bizarrement une tendance de l'été 2000, pas les vieilles baskets, mais de partir sans payer. Tout c
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