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Libération

«L'usine à nager» de la Butte-aux-Cailles

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publié le 16 septembre 2000 à 4h23

Tôt le matin, ils ne sont qu'une poignée de bonnets de bain à émerger de l'eau chlorée, à flotter d'un bord à l'autre du bassin, en silence, régulièrement, parfois amarrés à une planche en mousse. L'architecte Louis Bonnier voulait en faire une «usine à nager». La piscine de la Butte-aux-Cailles (Paris XIIIe) prend plutôt des airs de basilique, avec sa nef de 17 mètres de haut qui surplombe le bassin et se termine en abside, et ses sept arches de béton armé. Avec sa gangue de carrelage et de peinture aux dégradés rouilles, orangés et jaunes (teintes 1970), il y règne d'étranges lueurs, comme si le jour venait de se lever. Sauf quand les pompiers des casernes des environs viennent, comme ce matin, y passer leur test d'aptitude; ils iront chahuter et plonger à la rescousse de leurs mannequins jaunes dans les deux bassins extérieurs.

Sous la Butte-aux-Cailles, un puits qui libère, quelle que soit la saison, une eau à 28 degrés et alimente aujourd'hui encore la piscine. Une nappe souterraine atteinte en 1898, après trente-deux ans de forage. On fonde dix ans plus tard un établissement de bains-douches. Puis la piscine, en 1924, à l'heure où le sport fait des émules parmi les Parisiens.

Elle n'est, à l'époque, que la quatrième piscine municipale construite à Paris et, pour la première fois, Louis Bonnier pense à dissocier le bassin des vestiaires, dont les élégantes cabines individuelles bleues s'élèvent sur trois niveaux, obligeant les nageurs à passer par la case douche avant de