Le «bobo» est un animal que tout le monde prétend connaître mais que nulle catégorie statistique n'a encore réussi à cerner vraiment. C'est un gibier d'excellent pedigree scolaire, de statut enviable dans la meute sociale, aux habitudes plus vagabondes que sédentaires, aux goûts métissés et qui s'installe volontiers dans des tanières huppées de territoires qui le sont moins. On le dit politiquement anticonformiste et culturellement cosmopolite, mais dans des limites raisonnables au regard de son environnement personnel et familial.
Il doit son appellation de bobo» (bourgeois bohème) à un journaliste américain qui ne savait pas, en publiant l'année dernière Bobos in paradise (1) pour décrire le nouvel establishment de son pays, qu'il lèverait un lièvre repérable dans la plupart des grandes villes occidentales. Cet universel bobo aurait, plus particulièrement, «fait» le basculement de Paris à gauche, encore fallait-il le vérifier «scientifiquement». C'est que nous avons tenté de faire avec l'Institut Louis-Harris, sur la base d'un sondage postélectoral, réalisé entre les deux tours et dont les principaux enseignements ont été publiés dans Libération lundi dernier.
Mais comment arracher à l'échantillon habituel d'un sondage, ce sous-groupe inédit? Cette traque du bobo s'est faite sur la base d'une hypothèse: il a un revenu élevé, des diplômes et s'installe de préférence dans des arrondissements qui ont voté à gauche, ce qui inclut tous les quartiers populaires de la capitale, mai