Londres de notre correspondant
Les Irlandais, aussi favorables à l'euro soient-ils, redoutent l'adoption d'une nouvelle monnaie. Car, à la différence des habitants du continent, ils ont encore à l'esprit l'expérience récente et douloureuse de l'abandon du shilling en 1971. Toutes les personnes âgées de plus de 40 ans vous le diront : quand l'argent change, les commerçants en profitent pour augmenter leurs prix. «A chaque fois que l'on parle du passage à l'euro, il y a toujours cette peur non fondée d'un retour de l'inflation», explique Gary Rynhart, de la Confédération patronale irlandaise (IBEC).
Calculette folle. 15 février 1971. A l'époque, la livre, frappée d'une harpe ou d'entrelacs, les symboles gaéliques, liait encore son destin à sa voisine britannique. Les banques centrales de Londres et de Dublin avaient troqué en même temps les unités de valeur «impériales», terriblement complexes, contre un système de numération décimale. Il fallait jusque-là 12 pence pour former 1 shilling et vingt fois plus pour obtenir l'équivalent de 1 livre. De quoi rendre folle une machine à calculer. Pendant la décennie suivante, les prix n'ont plus cessé de monter. Le traumatisme est tel que la commission gouvernementale chargée du passage à la monnaie unique a effectué des recherches sur ces années noires de l'économie irlandaise. «Nous nous sommes aperçus que l'inflation était due à de nombreux facteurs et principalement à la hausse des cours du pétrole, déclare John Norris, directeur de