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Jerome Charyn «Je détesterais qu’on les reconstruise»

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Les attentats du 11 Septembre 2001 aux Etats-Unisdossier
Septembre 2001. 4 - Ce monde qui a changé. L’écrivain, qui vit à Paris, évoque les tours jumelles :
publié le 21 septembre 2001 à 0h54

Dans son appartement parisien, Jerome Charyn, l’écrivain new-yorkais de Marylin la dingue, Zyeux bleus, Kermesse à Manhattan, que sa ville habite même quand il n’y réside pas, ne veut pas écrire pour les journaux qui l’ont sollicité ces jours-ci: «Ecrire c’est fictionner, créer un effet, ma langue devient une arme, ce qu’elle n’est pas quand je parle. Dans l’écriture, je cherche les mots comme une musique. Et je ne veux pas utiliser une musique pour décrire la destruction.» Il préfère parler, sur le mode de la conversation qu’il termine par une embrassade. Besoin de chaleur.

Pourquoi New York porte-t-il cette charge significative?

Par le passé, des villes ont été détruites, bombardées, alors pourquoi? Je ne peux l'expliquer autrement que par: le paysage a changé. Ou par: King Kong est mort à jamais. Il est associé à l'Empire State Building et aux tours jumelles. Ce monstre primitif, qui veillait sur cette femme et se battait contre les avions qui voulaient l'abattre, mariait l'animalité et les gratte-ciel. Il était l'expression de cette société new-yorkaise, extrêmement tribale, et contradictoire dans sa brutalité et sa tendresse. Quand j'étais gamin, sur le chemin de chez moi à l'école, je devais me battre six fois. Nous avons grandi avec cette nécessité de se battre. Tout cela est dans le tissu de la ville comme quand le maire dit aujourd'hui: «Continuez à vivre! Allez au restaurant!». Je n'avais pas d'affection pour les tours jumelles, je ne les aimais pas esthétique