C'est le retour du «grand jeu» en Afghanistan. L'expression avait été forgée par Rudyard Kipling dans son roman Kim pour résumer les manoeuvres auxquelles se livraient, à la fin du XIXe siècle, la Russie et l'Angleterre, la première voulant pousser ses conquêtes jusqu'aux mers chaudes du golfe Persique, la seconde cherchant à l'en empêcher pour protéger l'empire des Indes. La partie se déroulait alors sur le gigantesque échiquier d'Asie centrale, chacun des joueurs manipulant à sa guise, comme autant de pièces, rois, émirs, chefs religieux, de tribus et fous de Dieu. L'invasion de l'Afghanistan par l'armée Rouge, en décembre 1979, avait ressuscité l'expression. Cette fois, les Etats-Unis remplaçaient la Grande-Bretagne, agissant par joueur interposé via le Pakistan. Après la désintégration de l'URSS, l'Afghanistan semblait devoir perdre son rôle traditionnel d'Etat-tampon pour devenir un terrain d'affrontements des mouvances islamistes. C'était sans compter avec l'émergence, à partir de 1994, de l'ordre politico-religieux des taliban, mis en orbite par Islamabad dans son souci de vassaliser ce pays.
Russie indécise. La partie s'annonce cette fois bien différente. Mais l'on retrouve les protagonistes d'hier: Etats-Unis, Pakistan, Iran, Russie, plus tous les Etats limitrophes d'Asie centrale nés de l'implosion de l'URSS et qui se retrouvent en première ligne. Officiellement, ces pays sont peu ou prou dans le même camp, celui d'une hostilité plus ou moins déclarée envers les tal