J'ai quelques très bonnes raisons de garder le Comte de Monte-Cristo à proximité immédiate d'une relecture, en général estivale, d'en faire mon livre de chevet de tous les cinq ans environ.
Monte-Cristo est non seulement l'un des grands romans du XIXe siècle, c'est aussi l'un des grands récits mythologiques de l'aventure humaine. S'il n'est sans doute pas le premier roman à traiter de la vengeance, il est le premier à lui donner une dimension universelle : le héros, qui a toutes les bonnes raisons d'agir, devient un meurtrier en série dévoré par ses crimes, «un homme pareil à Satan, qui s'est cru un instant l'égal de Dieu». Que ceux qui ne s'en sont pas aperçu relisent, ou tout simplement découvrent, cette merveille de 1 200 pages.
L'ange exterminateur de la monarchie de Juillet. Celle du «Enrichissez-vous» de Monsieur Guizot. Monte-Cristo n'est pas un simple vengeur. Partant de son affaire personnelle (victime de la jalousie de ses propres amis), il entreprend une révolution froide et implacable, qui renverse la Sainte Trinité de son temps, qui a connu une certaine postérité : le pouvoir financier, le pouvoir judiciaire et le pouvoir militaire; incarnés respectivement par le baron Danglars et ses délits d'initiés, par le comte de Morcef et ses trahisons à répétition, et par le duc de Villefort, procureur du roi, et ses crimes. A l'origine de toutes ces fortunes, pense Alexandre Dumas, il y a un crime. Et Monte-Cristo s'acharne à les révéler en précipitant la ruine des trois p