Parc national de Bokor envoyé spécial
Sous une pluie lancinante, la colonne de cinq rangers progresse depuis le matin sur un étroit sentier gorgé d'eau. Autour d'eux, la forêt du parc national de Bokor, dans le sud-ouest du Cambodge, s'agite sous les bourrasques. L'averse semble amplifier les cris d'animaux. Ek Phyrun, chef de la section, se tient en alerte, le canon d'un AK 47 émergeant de son poncho ruisselant. Mais à mesure que la lumière décline, il doit se rendre à l'évidence : c'est un jour sans. Aucun braconnier capturé, pas un villageois pris avec un cobra ou un pangolin dans son sac de jute.
Ek et ses rangers, formés depuis deux ans par l'ONG WildAid à la lutte contre la destruction des animaux et des plantes menacés, sont chargés de protéger la vie sauvage dans ce parc de 1 600 km2. Ils sont en première ligne d'une guerre écologique dont le Cambodge n'est qu'un des fronts.
Menaces de mort. Ek et ses hommes décident de tendre une embuscade : assis dans un silence complet, ils surveillent à une distance d'une vingtaine de mètres un carrefour de sentiers boueux. Après moins d'une heure, deux chariots tirés par des buffles et chargés de planches de bois apparaissent à travers le feuillage. D'un bond, les rangers se placent en travers du chemin. «Où avez-vous coupé ce bois ?», demande Ek aux trois paysans interloqués. Les rangers suivent scrupuleusement la procédure indiquée par les formateurs de WildAid. La localisation de l'incident est donnée grâce à un GPS. Les trois p