Menu
Libération
Série

Le coq est vain

Article réservé aux abonnés
publié le 15 juillet 2003 à 23h56

Prenez un coq. Un beau coq. Un coq prétentieux. Le coq est prétentieux, mais le coq est vain. Le coq est un grand escogriffe, le coq griffe, le coq parle latin, cogito ergot sum, croit-il. Le coq se prend pour quelqu'un et monte facilement sur ses ego. Le coq déteste les calembours, au prétexte qu'ils sont vulgaires, en vérité, il ne les comprend pas. Brisons là et prenez un coq, un beau coq d'une dizaine de livres, saigné, plumé, vidé. Mort. Et ouvrez Toute la cuisine de Guy Martin à la page 645: «Découper le coq en morceaux», à cet instant de la recette, mais on ne perd rien pour attendre, on comprend mieux pourquoi il est conseillé de prendre un coq mort. Le coq est mort, donc, le coq est mort, il ne fera plus «cocodi, cocodet», il ne fera plus «cocodi, cocodet», il ne fera plus «codi-codet». Il le faisait, de son vivant, «cocodi» est ce qu'on pourrait appeler du latin de cuisine, ça ne lui portera pas chance, nous le verrons. Dans cette langue subalterne, «cocodi» signifie (impératif de «cocodere», «pondre un oeuf») «ponds un oeuf», «cocodite», «pondez un oeuf», selon que l'on s'adresse à plusieurs poules à la fois ou que l'on voussoie la poule dont on espère une progéniture (nous nous situons à la place du coq, c'est une figure de style qui porte un nom savant, mais ne compliquons pas), or le coq qui se croit supérieur à tous s'imagine le pacha de sa basse-cour et saute toutes les poules qui s'y trouvent, sans compter que le voussoiement n'est pas son fort, ni le latin,