Traditionnellement, la carte politique française ne coïncide pas avec la carte sociale. Des régions ouvrières l'Alsace, la Savoie, le bocage normand votent à droite, des régions de petite propriété paysanne le Limousin, la Gascogne votent à gauche. D'autres régions se conforment aux attentes des sociologues politiques : le Nord est de gauche et ouvrier, le sud du Massif central est de droite et rural.
Cette indépendance relative du social et du politique est menacée par l'ampleur de la crise économique et de ses conséquences sociales. La disproportion entre l'horizon lointain optimiste de la Constitution européenne et l'horizon proche menaçant auquel sont confrontés des travailleurs précaires, entre l'espace de plus en plus étendu de l'Union et le monde rétréci où les plus pauvres essaient de survivre, a créé un arc électrique entre le non et les régions françaises qui vont le plus mal. Quatorze des seize départements qui ont le plus fort pourcentage de non se trouvent en effet à la frontière nord-est et en bordure de la Méditerranée, les deux zones les plus fragilisées. Irruption des problèmes locaux et de la politique intérieure dans une question qui ne les concernait guère et se jouait à une autre échelle, a-t-on accusé. Mais comment demander à des personnes en situation précaire de se projeter dans un avenir beaucoup plus éloigné que celui qu'elles visent pour leur simple survie ?
Survie. A la racine des difficultés, on retrouve le chômage. Il est nettement plus im