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Libération
Critique

«Tout m'était encore poésie»

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La réserve des livres sulfureux de la Bibliothèque nationale
publié le 22 août 2006 à 23h01

«Quand j'étais seule, j'examinais cette incompréhensible poussée de cheveux mignons et les alentours de cet endroit précieux que je soupçonnais être d'une très grande importance, puisque tout le monde le cachait et le voilait avec tant de soins. Au lever, quand je me savais seule derrière les portes fermées, je décrochais un miroir de la paroi, je le plaçais par-devant et l'inclinais assez pour y voir le tout distinctement. J'ouvrais avec les doigts ce que la nature a si soigneusement clos et je comprenais de moins en moins ce que mes camarades m'avaient dit sur la manière dont s'accomplit l'union la plus intime entre l'homme et la femme.»

Heureusement, Pauline, 14 ans, prédisposée pour le chant, ne va pas rester niaise très longtemps. Cependant, elle va changer avec style, force psychologie et digressions, langage fleuri, dans un vrai roman qui ne se contente pas d'enchaîner les scènes de cul. Est-ce à dire que ces Mémoires d'une chanteuse, traduits d'un (e) anonyme allemand (e) sont au reste de l'enfer ce que le téléfilm érotique de M6 est au porno de génie ? Point. Ou alors, c'est Emmanuelle de Just Jaeckin. On a pu croire (Apollinaire l'argumente dans sa préface de 1913) qu'il s'agissait de l'autobiographie réelle d'une femme. En effet, la narratrice ne cesse de nous mettre en garde contre un «abandon trop complet à l'homme» dans les plaisirs et la nécessité de rester maîtresse de sa destinée («il pensait avoir acquis des droits et devenait