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Interview

Kirill Serebrennikov : «Il n’est plus honteux d’être russe»

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Kirill Serebrennikov, cinéaste, réalisateur et metteur en scène de théâtre
publié le 1er mars 2008 à 2h32

Il revient du tournage d’un film dans un village enfoui sous la neige, prépare une mise en scène de l’Opéra de quatre sous et donne rendez-vous dans une très chic galerie d’art où exposent ses amis. Kirill Serebrennikov, 38 ans, est un artiste multiple, très recherché et très à la mode ces temps-ci à Moscou. Né à Rostov-sur-le-Don, il a d’abord étudié la physique avant de bifurquer vers le théâtre, la publicité et le cinéma.

Que retenez-vous des années de la présidence Poutine ?

La Russie a beaucoup changé durant ces huit années. Sans que je puisse dire si c'est en bien ou en mal. D'un côté, il y a un problème avec la démocratie. De l'autre, le bien-être matériel de la population s'améliore. L'argent coule à flot. Et il n'est plus honteux d'être russe. Les gens ont retrouvé leur fierté. Mais ils sont de plus en plus indifférents, ils réalisent que plus rien ne dépend d'eux. La Russie a toujours été le pays des paradoxes. Aujourd'hui, c'est le pays des grands paradoxes.

Un de ces paradoxes n'est-il pas que les artistes sont plutôt heureux sous Vladimir Poutine ?

Un des grands charmes du régime est qu'il n'a pas vraiment défini ses goûts en matière artistique. Il n'impose pas ce qu'il est bon de faire. Les artistes profitent de l'argent du pétrole, que déversent les mécènes privés et l'Etat. Ce qui d'ailleurs n'est pas totalement nouveau. A l'époque soviétique déjà, les grands films de Tarkovski ont été tournés avec l'argent de l'Etat. Le grand théâtre so