Question posée par le 20/10/2017
Oui.
Cordialement.
Plus sérieusement, l'appartenance historique ne fait pas grand débat, même si d'aucuns relativisent la place de "Naoned" dans la Bretagne culturelle d'aujourd'hui. Mais effectivement, la Loire-Atlantique, département dont Nantes est le chef-lieu, est sortie du découpage millénaire breton soit depuis la création des départements en 1790 (qui faisait fi des divisions du territoire en échelon supérieur, donc), soit depuis la seconde moitié du XXè siècle et la création des régions administratives françaises.
Lors des débats sur la refonte du découpage régional en 2014, Jean-Marc Ayrault s'était déclaré publiquement en faveur de la réunification de la Bretagne avec Nantes et son département, la Loire-Atlantique. L'idée était de fusionner la région bretonne avec son voisin des Pays de la Loire. Mais Ségolène Royal, défendant l'intérêt économique de sa région Poitou-Charente (le voisin du dessous) y était opposée.
Début juillet 2014, un sondage LH2-BVA montraient qu'une majorité de Bretons (63%) et d'habitants de Pays-de-la-Loire (67%) étaient favorables à leur fusion. Un autre du même institut, réalisé le 10 juillet sur un échantillon plus large, donnait une majorité d'habitants de la région Bretagne en faveur d'une fusion avec la seule Loire-Atlantique (55%).
Sur le terrain de l'opinion, si l'on se fie aux sondages précités, Nantes, et son département la Loire-Atlantique, aurait donc toute sa place en Bretagne. Et de nombreux autres indices abondent en ce sens. Le chateau des ducs de Bretagne s'y trouve, le seul gratte-ciel de la ville s'appelle "Tour de Bretagne", la duchesse Anne de Bretagne y vivait, on trouve des panneaux "Naoned" pour annoncer la ville sur les routes, ainsi que des tags "44=BZH" (pour "Breizh", nom breton de Bretagne)... Sans compter les fest-noz et autres manifestations culturelles qui se déroulent un peu partout dans le département ligérien.
Le drapeau breton, soft power à lui tout seul par sa présence incongrue lors d'événements divers et variés, laisse également penser à une Nantes bretonne. Le Gwen ha du, créé au début du XXè siècle et inspiré de la bannière étoilée du drapeau américain, montre des mouchetures d'hermine ("L'Hermine" est d'ailleurs le nom de l'équipe de basket de Nantes), et des bandes noires et blanches, représentant les 9 diocèses historiques de la Bretagne "élargie" dont Nantes fait partie.
Histoire bretonne de Nantes.
La place de l'actuelle Loire-Atlantique dans l'histoire de la "réunification de la Bretagne" vaut aussi son pesant de cacahuètes.
Les racines bretonnes de Nantes remonteraient à l'antiquité, lorsque la ville faisait partie des premiers diocèses écclesiastique de Bretagne. L'Évêché de Nantes aurait ainsi été fondé au IIIè siècle. Contacté par Check News, l'historien Joël Cornette, grand prix d'histoire de l'Académie française pour son Histoire de la Bretagne et des Bretons, explique que «la Bretagne "élargie" (allant jusqu'à Nantes, ndlr) est une des seules régions de France restée immuable pendant près de mille ans.»
Même lorsque le royaume de France parvient à mettre au pas la Bretagne, au XVè siècle, celle-ci est rattachée à la «France» d'alors sous la forme d'une province royale dont les frontières sont bien celles d'une Bretagne élargie.
Alain Croix, l'un des historiens les plus critiques quant à l'histoire bretonne de Nantes, évoque l'année 1790 comme premier moment de rupture entre Nantes et la Bretagne après 700 ans d'appartenance «incontestable», lorsque les révolutionnaires décidèrent de supprimer la vieille organisation territoriale en «provinces» royales, calquée sur celles de l'Eglise, pour lui substituer le découpage en 83 départements. La Bretagne est divisée en 5 départments reprenant les 5 duchés bretons, dont la Loire-Atlantique.
Il faut attendre les premiers projets de «régionalisation» du XXème siècle pour que la Loire-Atlantique soit effectivement exclue du découpage breton par l'administration. La nouvelle organisation que l'on connait aujourd'hui dans laquelle la Loire-Atlantique est rattachée aux Pays de la Loire trouve son origine en 1955, avec le décret Pfimlin organisant le territoire en «programmes d'action régionale» à visée économique. Dans celui-ci, Nantes devient le point d'équilibre d'une région comprenant également Vendée, Sarthe, Mayenne, et Maine-et-Loire. Les futures lois de décentralisation des 1970 et 1980 confirmeront ce divorce.
Youness Rhounna (réponse publiée le 23 octobre)