Question posée par Martin Isse le 01/04/2018
Bonjour,
Votre question fait référence à un article de Closer, affirmant que la raison pour laquelle le chanteur n'avait pas obtenu sa nationalité française tenait à sa situation de bigamie.
Voici ce qu'écrivait Closer :
Avant de rencontrer DemDem, Maître Gims a craqué pour les beaux yeux d'une autre... et cela lui pose désormais problème pour obtenir la nationalité française. Selon les informations de Closer, en kiosque ce vendredi 29 mars, le chanteur a en effet été marié à une Française qui vit au Maroc, avant de dire "oui" à son épouse actuelle en 2005. Avec sa première femme, il a eu quatre enfants, dont DemDem connaît par ailleurs l'existence. Le seul hic ?Maître Gims n'a jamais divorcé, ce qui a entravé la demande de nationalité française de l'artiste, même s'il est arrivé sur le territoire français à l'âge de 2 ans. En effet, selon l'article L313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour devenir Français, il est interdit de vivre "en état de polygamie". Or, c'est juridiquement le cas en ce qui concerne Maître Gims. Et si la polygamie est une cause de refus d'une demande de naturalisation, la jurisprudence a également établi que le fait de vivre avec ses deux épouses dans un même foyer est rédhibitoire. Et si ce n'est pas le cas de Maître Gims, l'administration française ne lui a toutefois toujours pas accordé la nationalité.
L'article de Closer a été abondamment repris.
Le ministère de l'intérieur, contacté par Checknews, conteste la présentation faite par Closer : «la polygamie n'est pas la raison», en ajoutant : «nous n'avons pas à donner des raisons privées».
Selon nos informations, la situation évoquée par Closer (le chanteur n'aurait pas divorcé d'un premier mariage), sans forcément être considérée comme une «situation effective de polygamie», est bien un point de blocage de la procédure d'acquisition de nationalité du chanteur, mais n'est pas la raison principale. «Il y a un ensemble de points qui bloquent, et cette raison n'est pas la première, affirme une source au fait du dossier, précisant qu'il s'agit de «points administratifs qui peuvent être régularisés». Il y aurait, selon cette même source, des échanges entre les avocats du chanteur et le ministère de l'Intérieur.
Que disent les textes de loi?
Le code civil, qui régit l'acquisition de la nationalité mentionne la polygamie comme constitutive du défaut d'assimilation nécessaire à une naturalisation.
L'article 21-24 du code civil précise :
Nul ne peut être naturalisé s'il ne justifie de son assimilation à la communauté française, notamment par une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue, de l'histoire, de la culture et de la société françaises, dont le niveau et les modalités d'évaluation sont fixés par décret en Conseil d'Etat, et des droits et devoirs conférés par la nationalité française ainsi que par l'adhésion aux principes et aux valeurs essentiels de la République.
L'article 21-4 du même code civil précise :
La situation effective de polygamie du conjoint étranger ou la condamnation prononcée à son encontre au titre de l'infraction définie à <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?cidTexte=LEGITEXT000006070719&idArticle=LEGIARTI000006417616&dateTexte=&categorieLien=cid">l'article 222-9 du code pénal</a>, lorsque celle-ci a été commise sur un mineur de quinze ans, sont constitutives du défaut d'assimilation.
Dans les faits, une «situation effective de polygamie» est donc bien un obstacle à l'acquisition de la nationalité. Un avocat spécialiste précise toutefois à Checknews : «On ne peut pas comparer le cas d'une personne n'ayant pas divorcé d'un précédant mariage à l'étranger, tel que décrit par Closer, et le cas d'une personne vivant en France en situation effective de polygamie.» Ce qui expliquerait que le ministère réfute le terme «polygamie».
Maître Gims et la nationalité française, une longue histoire
Originaire de Kinshasa, arrivé en France à 2 ans, le chanteur a souvent parlé de ses démarches pour obtenir la nationalité française.
Dans un portrait publié en 2013 dans Libé, on lit :
<em>«J'ai fait les tests de langue il y a quelques années, mais je me suis senti humilié avec leurs questions. Il y avait des photos de femmes faisant le ménage ou la cuisine et on me demandait de dire ce qu'elles faisaient. J'ai préféré sortir de la salle. Dans ma tête, je me suis toujours senti français, j'ai toute ma vie et mes repères ici</em>», précise-t-il. Il assure qu'il s'y collera de nouveau dès qu'il aura un peu de temps.
En 2015, à la question du Parisien «Avez-vous obtenu la nationalité française aujourd'hui ?», il répond : «Non. Toujours pas. Ça prend tellement de temps. Je n'ai pas renoncé, mais il y a tellement de démarches, de rendez-vous... Et je pense que c'est même plus long pour quelqu'un comme moi, connu, qu'on surveille d'autant plus. Du coup, parfois, je me dis : en fait, je suis un artiste africain.»
En février 2016, il déclare sur France 2, à propos de sa naturalisation : «je le souhaite et ça ne saurait tarder, j'ai reçu un appel du gouvernement pour devenir Français donc je vais y aller, ça y est».
En décembre 2016, il affirme, sur le plateau d'ONPC, toujours sur France 2, qu'il n'a pas la nationalité française
En 2017, le chanteur aborde la question, cette fois en chanson, dans le titre Ana Fi Dar :
Si je prends la nationalité française<br/> J'ai bien peur de devoir accepter de rejoindre les militaires<br/> Et de rafaler sur des javons démunis, sans ami, sans abri cachés vers le sud de l'Équateur
Le 18 mars 2018, au micro d'Europe 1, le chanteur déclare : «Je ne suis toujours pas Français. J'avais fait une première demande qui m'avait été refusée. Je n'ai pas compris pourquoi. Je ne sais pas.»
En résumé : selon nos informations, la situation décrite par Closer, sans être considérée comme relevant de la «polygamie», est un des éléments de blocage de la procédure d'acquisition de la nationalité du chanteur, sans être la principale. Le ministère de l'intérieur, avec lequel les avocats du chanteur échangeraient, n'a pas souhaité communiquer les autres raisons.
Cordialement
C.Mt