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Le nouveau geste annoncé par Edouard Phillipe pour les retraités va-t-il vraiment coûter 350 millions d'euros?

Le montant n'est pas irréaliste. Les retraités modestes concernés par la mesure faite récemment par le gouvernement ne subissaient pas une hausse de 1,7 point de CSG mais de 4,5 points. D'où le gain (beaucoup) plus important avec la nouvelle exonération.
Le gouvernement confirme un geste pour 100.000 retraités (Photo DAMIEN MEYER. AFP)
publié le 25 septembre 2018 à 16h28

Question posée par CHORVOT le 20/09/2018

Bonjour,

Nous avons raccourci votre question, qui était la suivante: «Le Premier ministre a annoncé un geste pour les retraités, ceux qui sont proches du seuil de référence (22 000 euros par an pour un couple). Il devrait bénéficier à 300 000 personnes, pour un coût de 350 millions d'euros. Ceux-ci devraient échapper à l'augmentation de la CSG (+ 1,7%). Soit 1,7% de 22 000 euros = 374 euros. Soit 300 000 retraités x 374 euros = 112 millions d'euros. Or 350 millions d'euros / 300 000 retraités = 1167 euros, correspondant à un revenu annuel de 68 600 euros. Comment expliquer cette différence?»

Le Premier ministre a effectivement annoncé, jeudi sur France Inter, que les retraités qui passaient au-dessus du seuil de revenus conduisant à la hausse de CSG de 1,7 point ne seraient pas concernés en 2019. Il faudra en effet «être passés deux ans en continu au-dessus du seuil […] pour être frappé par l'augmentation de la CSG». Plus tard, auprès de nos confrères de France Info, les services du Premier ministre ont corrigé un point de sa déclaration en expliquant qu'il s'agissait de 300 000 foyers fiscaux et non 300 000 personnes.

Reprenons le calcul sur la base de ces déclarations. Pour être soumis à la hausse de la CSG de 1,7 point en 2018, un couple de retraités devait gagner plus que 22 100 euros de revenu fiscal de référence (en 2016). Soit près de 24 000 de revenus réels. Mais attention, ceux qui ont dépassé soudainement ce seuil n’ont pas vu leur CSG augmenter de 1,7 point seulement, mais de 4,5 points. En effet, ce couple était soumis auparavant à un taux de CSG réduit de 3,8% (qui n’a pas été touché par la hausse de 1,7 point). En passant la barre des 24 000 euros de revenus par an, ce couple se trouve donc soumis d’un coup au taux plein de CSG (6,6%), qui a entre-temps augmenté de 1,7 point, soit un taux de 8,3%. Il passe donc de 3,8% à 8,3%, soit 4,5 points. Pour une pension un peu au-dessus du seuil, disons 24 500 euros, il se trouve à devoir acquitter une CSG supplémentaire de 1102 euros par an.

Si l’on considérait que tous foyers fiscaux de retraités étaient en couple, cela donnerait donc 300 000 x 1102 euros = 330 millions d’euros, soit un chiffre proche de celui donné par le Premier ministre (350 millions d’euros).

Pour une personne seule, le seuil est de 14 400 euros de revenu fiscal de référence (15 600 de revenus réels). Avec une hausse de la CSG de 4,5 points lors du franchissement de ce seuil, mettons avec 16 000 de revenus réels, la perte est de 720 euros par an. Si l’on considérait que tous les retraités étaient célibataires, cela donnerait 300 000 x 720 euros, soit 216 millions d’euros. Un chiffre cette fois-ci un peu plus éloigné de celui donné par l’exécutif.

En réalité, les foyers fiscaux de retraités peuvent être composés soit d’un couple de retraités, soit d’un retraité seul, soit encore d’un couple avec un retraité et un actif. Difficile, donc, d’appliquer un calcul permettant de rejoindre exactement le chiffrage du gouvernement. D’autant que les calculs précédents ont été faits avec un franchissement très faible du seuil. Or il y aura forcément des foyers fiscaux de retraités dont le dépassement sera plus important, conduisant à un gain plus important. Entre la composition différente des foyers fiscaux et les dépassements plus importants, le coût de 350 millions pour 300 000 foyers fiscaux n’est donc pas irréaliste.

CheckNews a néanmoins sollicité Matignon pour plus de précisions. Nous attendons leur réponse.