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Un an après l'attentat de Marseille, les familles ont-elles attaqué l'Etat ?

Les parents des victimes de l'attentat de Marseille en 2017 accusent la préfecture du Rhône de «faute». Ce n'est pas une première.
La gare de Marseille Saint-Charles le 1er octobre 2017. (AFP)
publié le 9 octobre 2018 à 12h15

Question posée par Ferenc Pu le 07/10/2018

Bonjour,

Nous avons reformulé votre question, la voici en intégralité: «La plainte des parents de Mauranne et Laura contre l'Etat a-t-elle des chances d'aboutir (y a-t-il des précédents) ?»

Vous faites référence au recours contre l'Etat déposé par les familles de Laura et Mauranne, les deux jeunes femmes assassinées par un terroriste à la gare Saint Charles de Marseille l'année dernière. Leur avocate Alice Cabrera l'a annoncé au Figaro la semaine dernière. Un recours administratif pour «faute» a été envoyé contre l'Etat le 28 septembre dernier selon leur conseil. Le meurtrier des deux cousines avait été interpellé et placé en garde à vue pour vol à l'étalage et remis en liberté moins de 24 heures avant son arrivée à Marseille. En situation irrégulière, il n'avait pas été placé en centre de rétention. Il avait déjà été arrêté sept fois sous sept identités différentes. Ces révélations avaient suscité une vive polémique et une enquête administrative à l'issue de laquelle le préfet du Rhône avait été limogé.

Les parents des victimes reprochent à l'Etat de ne parler que de «dysfonctionnements». Ils ont ainsi indiqué à M6: «Nous avons l'impression que l'État cherche à minimiser sa responsabilité en ne parlant que de 'dysfonctionnements graves du dispositif d'éloignement'. Pour nous, il s'agit d'une véritable faute avérée». Le recours administratif pour faute grave vise directement la préfecture de police.

Vous nous demandez si les parents peuvent espérer obtenir justice, et s’il existe des précédents. Nous ne pouvons répondre qu’à la seconde partie de votre question: la réponse est oui.

En 2014, la famille du caporal-chef Abel Chennouf assassiné à Montauban par Mohamed Merah avait déposé un recours administratif contre l'Etat pour défaillance des services de renseignement. Le tribunal administratif de Nîmes a reconnu le 12 juillet 2016 une «faute simple» de l'Etat, notamment car «le défaut de surveillance a facilité son forfait et empêché la détection de tout signe annonciateur des intentions de l'individu». Suite à un appel rendu en faveur du ministère de l'Intérieur, le conseil d'Etat a finalement tranché le 18 juillet dernier et rejeté le pourvoi de la famille.

Le même jour, le tribunal administratif de Paris rejetait le recours d'une trentaine de victimes du 13 novembre. «Le tribunal administratif relève enfin qu'aucun élément ne permet d'engager la responsabilité de l'Etat», notait-il dans un communiqué. Leur avocate, Samia Maktouf, a fait appel devant la cour administrative.

Par ailleurs, plusieurs victimes d'attentats ont aussi déposé plainte au pénal. Après une plainte de familles de victimes de Nice pour «mise en danger de la vie d'autrui», l'enquête préliminaire a été classée sans suite. Elles se sont portées partie civile dans les enquêtes en cours.

Le 15 mai, 17 familles de victimes du Bataclan ont porté plainte contre X pour «non-assistance à personne en péril en l'absence d'intervention des militaires lors des attentats perpétrés au Bataclan». Les parents d'une victime ont aussi déposé une requête contre la Belgique devant la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), pointant un manquement des autorités belges dans la surveillance des auteurs de l'attentat originaires de Belgique.

La différence entre un recours administratif et une plainte pénale contre X consiste à faire reconnaître la responsabilité de l’Etat. La plainte pénale ne peut pas être déposée contre l’Etat qui n’est pas responsable pénalement.

Cordialement