Question posée par Nico Mourcel le 27/10/2018
Bonjour,
Nous avons raccourci votre question initiale: «La leader des FEMEN Brésil (Sara Winter) appelle-t-elle à voter extrême droite du fait d'un besoin de sécurité ?»
Votre question fait référence à un reportage diffusé par la chaîne de télévision Euronews le 26 octobre 2018, dans lequel intervient une femme brésilienne: Sara Winter.
La voix off la présente ainsi:«Sara Winter est la fondatrice de la branche brésilienne du groupe Femen et elle milite pour le candidat d'extrême droite et favori du scrutin Jair Bolsonaro.» Elle explique alors ce choix: «Aujourd'hui, le Brésil manque d'autorité aujourd'hui. C'est ce qui nous manque. Aujourd'hui, les voleurs savent qu'il n'y a pas d'autorité. Il y a des policiers, mais ils ne respectent pas la police. L'officier de police est chassé. Il y a l'autorité judiciaire… Mais ils ne respectent pas les juges. Il y a la corruption. Tu y vas, tu les paies et voilà c'est réglé.»
Sara Winter, une ex-féministe devenue anti-avortement
Selon ce reportage, on pourrait donc croire que la branche brésilienne du mouvement féministe FEMEN soutient le candidat Jair Bolsonaro. Une prise de position qui paraît contradictoire avec les accusations de sexisme qui pèsent sur le nouveau président brésilien.
Pour comprendre cette prise de position CheckNews a donc commencé par vérifier l'identité de Sara Winter, de son vrai nom Sara Fernanda Giromin. Première surprise, Sara Winter n'est plus féministe. Sur son site la supposée leader des FEMEN au Brésil se présente désormais comme «une ancienne féministe, conférencière et écrivaine. Elle était la leader de FEMEN, le groupe le plus radical du monde en matière de défense du féminisme. L'écrivaine a milité contre le christianisme en faveur de l'homosexualité et de l'avortement. Après sa grossesse, elle s'est convertie au Christianisme et a écrit son premier livre dans lequel elle raconte les coulisses et les faits peu connus du féminisme au Brésil. Actuellement, elle est l'un des plus grands chefs de file pro-vie et pro-famille au Brésil, luttant contre l'avortement, l'idéologie de genre, les drogues, l'endoctrinement marxiste, les jeux de hasard et la prostitution.»
En ce qui concerne son statut de fondatrice ou de leader de FEMEN Brésil, il lui vient du fait qu'elle a été la première militante brésilienne à rejoindre le mouvement. Dans une interview, où elle revient sur son passé militant, Sara Winter raconte s'être rendue à 19 ans en Ukraine avec des billets d'avion payés par FEMEN, et avoir été formée durant un mois aux techniques activistes du «sextrêmisme». À son retour au Brésil, forte d'une popularité acquise aux côtés des militantes ukrainiennes, elle fonde FEMEN Brésil, et se retrouve invitée sur de nombreux plateaux de télévision.
Le lancement du mouvement se fait avec quelques difficultés: dès 2012 Sara Winter est accusée d'être une nationaliste à cause d'un tatouage montrant une croix de fer, mais aussi après la révélation d'un texte publié en 2011 sur un ancien blog personnel, où la fondatrice des FEMEN Brésil critiquait les manifestations sensationnelles des Slutwalks, où des femmes manifestaient quasi nues.
Virée de FEMEN en 2013
Dans sa description, Sara Winter indiquait avoir été la cheffe des FEMEN au Brésil. L'emploi du passé correspond au divorce avec le mouvement féministe FEMEN il y a plus de cinq ans. Le 20 mai 2013, la page Facebook des militantes féministes indique que «le mouvement international FEMEN ferme sa branche brésilienne FEMEN Brésil, menée jusqu'à ce jour par Sara Winter. FEMEN interdit désormais à Sara Winter d'employer les mots «FEMEN» et «SEXTRÉMISTE» pour définir son organisation,ainsi que d'utiliser des symboles de FEMEN, c'est-à-dire le logo, les couronnes de fleurs et tous les autres attributs du mouvement.»
L'organisation féministe justifie ce choix par des problèmes d'organisation, mais aussi par «le fait que Sara Winter, leader du mouvement, a abusé financièrement de FEMEN». Le communiqué se termine par une demande aux médias de ne plus qualifier «les actions de Sara Winter d'actions FEMEN». Une recommandation qu'Euronews n'a donc pas suivie.
Enfin, le soutien affiché de Sara Winter à Jair Bolsonaro ne correspond en rien à la ligne politique de FEMEN, qui a appelé à plusieurs reprises à «lui faire barrage».
En résumé: Sara Winter a bien fondé la branche brésilienne des FEMEN en 2012, mais a été exclue du mouvement féministe en 2013. Elle a radicalement changé depuis, puisqu'elle se présente désormais comme une militante anti-avortement, qui a soutenu le candidat d'extrême droite Jair Bolsonaro.
Cordialement