Question posée par David.D le 31/01/2019
Bonjour,
Lors de la manifestation de l'acte XI des gilets jaunes samedi 26 janvier, «trois CRS ont été attaqués à coups d'acide au visage». Le ministre de l'intérieur Christophe Castaner est affirmatif, mardi 29 janvier sur le plateau de RMC/BFM. Le soir même il récidive et précise, devant les députés face à qui il défend le projet de loi «anticasseur» : «Samedi dernier, à Quimper, de l'acide a été jeté au visage de trois CRS.»
#Police #GiletsJaunes
— RMC (@RMCinfo) January 29, 2019
"Samedi dernier 3 CRS ont été attaqués à coups d'acide au visage (...) Les "black Blocs" sont là pour casser, ils sont là pour tuer"
➡️ @CCastaner min. de l’Intérieur#BourdinDirect pic.twitter.com/krx7TuS6Z8
Problème : Castaner voit triple. La préfecture du Finistère refuse d'en dire plus que ses communiqués, qui font état de «jets de projectiles, contenant notamment de l'acide» sur les forces de l'ordre. Mais elle renvoie vers une source policière requérant l'anonymat. Selon celle-ci, il n'est pas question de trois policiers touchés au visage par de l'acide, mais d'un seul, à la fin de la manifestation des gilets jaunes du 26 janvier à Quimper.
«La CRS 9 tentait, place de la Résistance, de protéger la préfecture et a subi de nombreux tirs de projectiles, détaille notre interlocuteur. Ils ont alors reçu à leurs pieds des bouteilles en plastique contenant de l'acide chlorhydrique et des boulettes d'aluminium. Quatre policiers ont eu des projections sur leurs vêtements, et l'un d'entre eux a été touché au visage et aux yeux. Il a été soigné par un médecin de la police et a pu garder son poste.»
Il y a donc, selon cette source policière, bien eu un policier touché au visage. Mais pas trois, comme le dit le ministre.
1200 policiers et gendarmes blessés
Si l'existence de violences à l'encontre des policiers en marge des manifestations des gilets jaunes est avérée, ce n'est pas la première fois que le gouvernement ou la majorité les exagèrent. CheckNews vous racontait déjà, début décembre, qu'il était faux de dire que des policiers avaient été «défigurés» à l'acide, contrairement à ce que laissait entendre la communication de LREM à partir de propos du secrétaire d'Etat Gabriel Attal qui avaient été, selon le cabinet de l'intéressé, mal compris.
A ce jour, selon le ministère de l'intérieur, 1100 membres des forces de l'ordre ont été blessés depuis le début du mouvement des gilets jaunes. Le ministère n'effectue pas de distinction à partir de la gravité de ces blessures. Côté manifestant, Beauvau compte 1900 blessés. CheckNews a pour sa part recensé 144 blessés graves.
Condamnations pour des jets d’acide
Le ministère et la police nationale ne centralisent pas les informations sur les jets d'acide à l'encontre des forces de l'ordre, mais il y a eu des précédents. Outre les déclarations de policiers (à France 2 en décembre, par la suite à l'AFP en janvier), plusieurs parquets sollicités par CheckNews rapportent des faits similaires.
«De manière régulière», les policiers et gendarmes recevraient «bouteilles de plastique ou de verre contenant de la peinture, de l'essence ou de l'acide» selon le procureur de Toulouse (Haute-Garonne), qui n'a toutefois pas enregistré de «signalement individuel par un policier» qui aurait été touché par un jet d'acide.
«A plusieurs reprises» des agents «ont été touchés» par de l'acide, rapporte de son côté le procureur de Montpellier (Hérault), «fort heureusement sans causer de blessures graves». Et de conclure : «Ces faits donnent évidemment lieu à des enquêtes judiciaires.»
Début décembre, un jeune d'une vingtaine d'années est condamné à huit de mois de prison ferme après avoir avoué qu'il avait confectionné et lancé de l'acide contre les forces de l'ordre à Tours (Indre-et-Loire), selon France Bleu. Un autre jeune a également reconnu avoir jeté une bouteille d'acide lors d'une manifestation à Besançon (Doubs) sans blesser personne - il a écopé à la fin décembre d'une peine de 6 mois de prison, également selon France Bleu.
Au Puy-en-Velay (Haute-Loire), un homme de 44 ans a aussi été condamné au début du mois de janvier pour avoir jeté des projectiles sur les forces de l'ordre, blessant deux agents (avec ITT). Parmi ces projectiles : du liquide. Les forces de l'ordre ont assuré qu'il s'agissait d'ammoniaque en «se fondant sur l'odeur», explique le parquet à CheckNews, tout en précisant qu'aucune analyse n'a été faite sur les tenues des forces de l'ordre. L'intéressé assure pour sa part qu'il s'agissait d'eau.